Une des figures emblématiques de la révolution de mars 1991, Bakary Koniba Traoré, alias «Pionnier» a toujours été à la pointe de tous les combats pour l’avènement de la démocratie, la protection et la défense des droits de l’homme au Mali. Ce qui lui a valu quatre ans de bagne à Kidal lorsqu’en 1974, le prétendu Comité militaire de libération nationale (CMLN) a voulu légaliser son régime d’exception d’inspiration fascisante dirigé par Moussa Traoré. En effet, l’homme n’a jamais raté aucune occasion pour tirer la sonnette d’alarme quand il le fallait. Cependant, aujourd’hui, pour ce qui est de la révolution du 26 mars 1991 dix sept ans après, le «Pionnier» estime qu’il n’y a pas lieu de désespérer de la lutte pour la démocratie. «Tout n’a pas été rose même avec les prophètes de Dieu, à plus forte raison pour nous, les hommes ordinaires». A l’entendre, «il y a un problème de conjugaison des efforts, lié aux ambitions des uns et des autres» qu’il faut corriger pour mettre les choses sur les rails.
En prélude de la commémoration du dix septième anniversaire de la révolution du 26 mars 1991, qui a vu la chute du régime militaro-fasciste du Général Moussa Traoré, une conférence-débat avait eu lieu, le mardi 25 mars, au Mémorial Modibo Kéïta. Il visait à rendre hommage aux martyrs de la révolution. Elle était animée par Bakary Koninba Traoré, alias «Pionnier», le Pr Ali Nouhoun Diallo et le Dr Akori Ag ikinane. Tous trois figures emblématiques de la lutte pour l’avènement démocratique au Mali.
Prenant la parole le premier, sous le contrôle du modérateur Mamoutou Thiam, secrétaire général de l’Amicale des anciens militants et sympathisants de l’Union nationale des élèves et étudiants du Mali (AMS-UNEEM), Dr Akori Ag Ikinane a souligné de prime abord que «le 26 mars 1991 est l’aboutissement d’un processus qui nécessite d’être amélioré». Avant de citer des acquis incontestables du combat qui s’articulent autours de la liberté d’expression, d’association, le multipartisme intégral et la décentralisation.
A côté de ces acquis, l’orateur a déclaré que le Mali a manqué un certain nombre de rendez-vous. Tel que celui du «Kokadjè», c’est-à-dire la gestion transparente des affaires publiques et l’amélioration du système éducatif qui constituaient, à l’époque, l’une des revendications principales du mouvement démocratique. «Aujourd’hui, le phénomène de la corruption, du clientélisme et de la délinquance financière persiste malgré tout» a-t-il souligné. Avant d’ajouter que «notre système éducatif, gage de tout développement, va à vau-l’eau».
Cet état de fait, Dr Akori Ag Ikinane, par ailleurs membre de l’instance dirigeante du CNID, le met au compte des manquements aux idéaux de la révolution du 26 mars auxquels il urge de porter des corrections appropriées afin que le Mali puisse avancer davantage vers un développement harmonieux.
Tout en reconnaissant les acquis et les faiblesses développés par Dr Akori Aghnane, Bakary Koniba Traoré a affirmé qu’«il y a un problème de conjugaison des efforts, lié aux ambitions des uns et des autres». Malgré tout, le «pionnier» a appelé à la retenue : «le 26 mars 1991 est à la fois un aboutissement et un commencement. Il est, d’abord, l’aboutissement de la lutte menée contre le régime dictatorial, militario-fasciste de Moussa Traoré pour l’ouverture démocratique et, ensuite, un commencement pour la construction d’un Mali démocratique et prospère. Si nous avons totalement gagné le premier combat, des efforts sont à faire pour le second» a souligné le secrétaire politique du Rassemblement Pour le Mali (RPM).
A ce sujet, il n’y a pas lieu de désespérer, à en croire «Bakary Pionnier» qui affirme que «tout n’a pas été rose même avec les prophètes de Dieu, à plus forte raison avec nous».
Afin d’apporter des améliorations au processus de la démocratisation, il estime qu’il faut des critiques saines, constructives et compter sur «l’originalité malienne» qui consiste à dialoguer toujours dans le cadre de la recherche des solutions aux problèmes posés.
Pour sa part, le professeur Ali Nouhoun Diallo, ancien président de l’Assemblée nationale, a laissé entendre qu’au Mali, 17 ans après la révolution du 26 mars, «des progrès quantitatifs» ont été faits en matière d’équipements collectifs avec moins de «qualité». Il a affirmé que «la conscience patriotique mérite un examen». Avant d’appeler les acteurs à jouer le rôle de gardien du temple et à s’organiser davantage pour ne servir que le peuple.
L’épineuse et sempiternelle question de l’école, partagée par les trois conférenciers, est revenue au centre des débats avec, à la clé, des accusations formulées de part et d’autre à l’encontre des parents d’élèves, des professeurs et de l’Etat.
«Il faut prendre à bras le corps le problème de l’école» a souligné l’ancien ministre du Travail et de la Fonction publique, Modibo Diakité, avant de se réjouir de la sortie du Premier ministre, Modibo Sidibé, qui se propose de d’organiser un forum national sur la question dans les six mois à venir.
Alassane DIARRA
27 mars 2008.