Augustin Cissé, directeur de la Fondation Centre malien pour le dialogue inter partis et la démocratie (CMIDD, a séjourné au Burkina Fasso où au nom de la Fondation CMIDD, il a été acteur de l’organisation des élections présidentielles à travers un stage dans la Commission électorale provinciale indépendante (CEPI) du Houet. Dans l’entretien ci-dessous M. Cissé exprime ses impressions sur le processus électoral du Burkina Faso tout en relevant des éléments comparatifs à celui du Mali.
Les Échos : En Quelques mots quels sont les objectifs de votre séjour dans la CEPI du Houet au Burkina Faso ?
Augustin Cissé : Ce séjour visait essentiellement trois objectifs. Premièrement, étudier le dispositif fonctionnel et organisationnel de la CEPI en période électorale. Deuxièmement, il consistait à étudier le dispositif opérationnel, c’est-à-dire le mandat et les principales activités de la CEPI dans la préparation, le déroulement du scrutin et la gestion des résultats. Enfin, le troisième objectif était de poser un regard comparatif global entre l’administration des élections au Mali et celle du Burkina Faso.
Les Échos : Quels sont les résultats auxquels vous avez abouti au terme de cet apprentissage de l’administration des élections au Burkina Faso ?
A. C : D’abord, sur le dispositif structurel et organisationnel de l’administration des élections au Burkina Faso, il faut dire que la ligne hiérarchique se compose comme suit : au niveau national, par une commission électorale nationale indépendante (Céni) et au niveau provincial, ce qui correspond au cercle au Mali, par une Commission électorale provinciale indépendante (Cepi) et au niveau communal et des arrondissements, (Bobo et Ouaga) l’administration des élections est confiée à des Commissions électorales communales indépendantes (CECI) et à des Commissions électorales indépendantes d’arrondissement (CEIA).
Leurs présidents sont nommés par arrêtés du président de la CEPI par délégation du président de la CENI. Les CECI et CEIA ont presque les mêmes activités que les CEPI au niveau local. La CENI, au Faso, est dirigée par un président élu par les représentants des organisations de la société civile. Ses missions sont la constitution, la gestion et la conservation du fichier électoral national, l’organisation et la supervision des opérations électorales et référendaires.
Elle se compose de 5 représentants des parts politiques, 5 représentants pour les partis de l’opposition, 5 représentants des organisations de la société civile dont 3 pour les communautés religieuses, 1 pour les autorités coutumières, et 1 pour les organisations de défense des droits de l’Homme. Ce qu’il faut ajouter c’est que la CENI au Faso est dirigé par un bureau permanent de 4 membres, le président, deux vices président et deux rapporteurs.
Seuls le président et les deux vices président sont élus pour un mandat de 5 ans renouvelable une fois, les deux autres membres sont élus pour un an renouvelable. Au niveau provincial, ce qui correspond au cercle au Mali, je le disait tantôt, la Commission électorale provinciale indépendante est composée de 6 membres représentants les partis politiques de la majorité, 2 pour les partis politiques de l’opposition et membres pour les organisations de la société civile.
Nous avons également appris beaucoup sur les aspects financiers et de rémunération des démembrements de la CENI et des membres des bureaux de vote, sur le matériel électoral et sur la carte électorale du Houet.
Les Echos : Dites nous maintenant quels sont vos éléments de regard comparatifs entre l’administration des élections au Mali et celle du Burkina Faso puisque c’était l’un de vos objectifs ?
A.C : Je peux dire que d’une manière générale, la CENI au Burkina Faso a plus de pouvoir que celle que le Mali a connue jusque-là. Elle est à tous les niveaux du processus électoral alors qu’au Mali, son rôle a toujours été l’organisation matérielle et la supervision des élections. La permanence de la CENI est assurée au niveau national au Burkina Faso, mais au Mali, le dispositif disparaît avec les moyens matériels après les élections donc plus de patrimoine matériel et de capitalisation de l’expérience.
La région n’est pas dans le dispositif organisationnel des élections au Faso alors que celle-ci est niveau bien valorisé dans le modèle malien qui a fonctionné jusque-là Le projet d’agence des élections prévoit de maintenir la région comme élément du dispositif. Au Faso, le recensement de la population est confiée aux CECI/CEIA sous la supervision des CEPI.
Au Mali, la pratique à ce niveau a été jusque-là de confier le recensement au MATCL et aux structures déconcentrées. Il faut signaler que l’inscription est volontaire au Burkina Faso alors qu’au Mali jusque-là c’est l’inscription d’office. La tendance est d’aller vers le système du Burkina Faso. La neutralité de l’administration est assurée dans le dispositif du Burkina Faso alors qu’au Mali, le rôle de l’administration a toujours été très important au point que sa neutralité a presque toujours été contestée. Sur le plan matériel et des dépenses, des éléments observés au Burkina Faso montrent plus d’objectivité et de réalisme dans les dépenses de la CENI.
Les coûts de communication par flotte (réseau gratuit de téléphonie dans lequel se trouvent tous les membres du siège de la CENI , tous les présidents des CEPI/CECI/CEIA), l’utilisation des véhicules et des chauffeurs des services publics déconcentrés, le faible niveau de rémunération du personnel.
Les Echos : Quelle conclusion tirée vous de ce stage de l’administration des élections au Burkina Faso et comptez-vous échanger cette expérience avec les acteurs du processus électoral au Mali ?
A.C : A tout point de vue, ce stage a été bénéfique, car il a permis d’apprendre l’essentiel sur le dispositif légal, administratif et organisationnel des élections au Burkina Faso et surtout de faire une analyse comparative entre le modèle d’administration des élections du Burkina Faso et celui du Mali. D’une manière générale, les objectifs poursuivis à travers ce séjour ont été atteints.
Entretien réalisé par Denis Koné