Le moins qu’on puisse dire est que le président de la République, Amadou Toumani Touré, est à la croisée des chemins. Sa dernière intervention, sur les ondes de Rfi, a été perçue par bon nombre d’observateurs comme les commentaires d’un homme très désabusé. Toujours est-il qu’il tient encore à laisser une bonne marge de manœuvre à ses ‘’ amis ‘’, en évitant, selon lui, ‘’ d’ouvrir une campagne électorale hâtive et inutile ‘’. C’est donc dire qu’il ne martèlera pas, de façon péremptoire, qu’il ne briguera pas de troisième mandat.
Cela va de soi, car, il l’a et à maintes reprises, bel et bien, fait savoir, notamment le 8 juin dernier, lors de sa rencontre avec la presse. L’heure n’est donc plus propice pour continuer de s’agripper au fonds de commerce ATT, qui a été durement secoué par les épreuves d’Al Qaïda.
Ces épreuves, sous d’autres formes, continuent par l’intermédiaire du bras de fer entre la Mauritanie et le réseau islamiste. Le dénouement de ce bras de fer contribuera sûrement, pour les observateurs nationaux et internationaux, à interpréter ou juger l’action du président de la République ATT , après la libération des quatre Salafistes.
En tout cas, Al Qaïda a prouvé plus d’une fois qu’il restait extrêmement dangereux. A titre de rappel, il faut dire qu’au Mali, en Juin 2009, un touriste britannique, pris en otage en janvier avec trois autres personnes dans le nord du pays a été exécuté. Ensuite, un officier est assassiné à Tombouctou. En Juillet 2009, Al-Qaida affirme avoir tué 28 soldats et capturé trois militaires lors d’une embuscade contre un convoi de l’armée.
En novembre 2009, le Français Pierre Camatte, est enlevé dans le nord du pays. Enlèvement qui a suscité un grand ballet diplomatique de la part du gouvernement français, jusqu’à la date de sa libération qui a eu lieu, mardi 23 février dernier. Les menaces de la nébuleuse sont donc très sérieuses, d’autant plus qu’elle traîne dans son sillage la cocaïne et les intermédiaires locaux.
Il faut le dire, le Nord de notre pays est devenu un espace qui ne laissera sûrement pas de répit aux gouvernements. D’autant plus que le président de la République, ATT, qui s’est senti très seul, lors des marches contre le code des personnes et de la famille doit encore relever plusieurs défis : entre autres, renouer les relations diplomatiques avec l’Algérie et la Mauritanie – qui ont rappelé leurs ambassadeurs – et convaincre les Etats-Unis et les institutions internationales de l’opportunité de la libération des Salafistes.
A cet effet, le Comité de défense nationale, présidé par le Chef de l’Etat, s’est réuni, à Koulouba, vendredi dernier, le plan d’urgence 2010 de lutte contre le terrorisme et le trafic de drogue. Lors de sa rencontre, le 3 mars, avec les diplomates accrédités dans notre pays, le ministre des Affaires étrangères et de la coopération internationale, Moctar Ouane, avait déjà annoncé cette réunion.
Le ministre avait, à l’occasion, expliqué les raisons qui ont amené le Mali à libérer les quatre Salafistes. ‘’Une décision, avait-il dit, rendue par une justice indépendante. ‘’ Malgré tout, Moctar Ouane a reconnu l’importance des liens qui unissent notre pays avec l’Algérie et la Mauritanie, car, avait-il précisé, ‘’seule une action concertée permettra de combattre le banditisme transfrontalier ‘’.
Vendredi dernier, au cours d’une interview, le président du comité de suivi de l’Accord d’Alger, Mahamadou Diagouraga, s’est voulu rassurant, en indiquant que les Algériens sont toujours restés dans le cadre de l’Accord d’Alger.
Toutefois, des inquiétudes demeurent quant à la volonté de collaboration de l’Algérie et de la Mauritanie avec notre pays, concernant les problèmes du Nord. D’autant plus que le refus catégorique de la Mauritanie de libérer les prisonniers conformément aux exigences d’Al Qaïda continue d’entretenir un malaise au niveau national et international.
Baba Dembélé
Le Républicain du 09 Mars 2010.