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Il a surtout exhorté les diplomates à faire en sorte de « conférer à notre diplomatie un profil davantage productif, mobilisateur des flux de ressources indispensables à notre développement et à promouvoir une coopération stratégique avec nos partenaires« .

Cest un véritable discours-programme qu’a prononcé, mercredi dernier, le président Amadou Toumani Touré à l’ouverture de la dixième Conférence des ambassadeurs et consuls généraux du Mali.

Après avoir souhaité aux invités une « chaleureuse bienvenue à la Maison du Mali« , il a tenu à rendre un hommage particulier aux consuls honoraires pour « leur disponibilité et leur profond attachement au Mali qu’ils servent avec beaucoup de cœur et d’abnégation« .

Sans oublier les anciens diplomates et anciens consuls généraux « qui ont posé les premiers jalons de la diplomatie malienne et œuvré à sa consolidation tout au long de leur carrière« .

La tenue de cette conférence est une occasion d’engager une réflexion approfondie, entre autres, sur la modernisation de l’outil diplomatique afin qu’il réponde mieux aux attentes du peuple, a-t-il ajouté.

Avant de se féliciter des succès enregistrés, ces dernières années, par la diplomatie malienne. Il en veut pour preuve les rencontres qui ont eu lieu au Mali, les nombreuses visites qu’il a échangées avec d’autres chefs d’Etat.

Il a également pris l’exemple des postes occupés par les Maliens dans les organisations internationales : Alpha Oumar Konaré, président de la Commission de l’Union africaine, et Soumaila Cissé, président de la Commission de l’UEMOA, entre autres.

Car, pour le Président, l’aura de la diplomatie malienne peut se jauger aussi à l’aune des positions qu’occupent les Maliens au sein des organisations internationales.

Amadou Toumani Touré a rappelé que dans la lettre de cadrage qu’il avait adressée au Premier ministre en octobre 2002, il invitait le Gouvernement « à conférer à notre diplomatie un profil davantage productif, mobilisateur des flux de ressources indispensables à notre développement et à promouvoir une coopération stratégique avec nos partenaires« . Une vision qui doit, selon lui, demeurer la trame de l’action des diplomates et consuls maliens.

De son avis, malgré de nombreux progrès accomplis, il est difficile de relever les défis du 21e siècle dans le contexte actuel où certaines populations africaines vivent dans l’extrême pauvreté.

Face à ces défis, il prône un partenariat fécond qui puisse apporter à l’Afrique « des ressources financières suffisantes, stables et prévisibles« .

Un partenariat dans lequel « l’alignement sur les stratégies nationales et l’harmonisation des procédures de mobilisation des ressources » et une meilleure gouvernance mondiale indispensable à l’atteinte rapide des Objectifs du millénaire pour le développement et à l’émergence de l’Afrique comme pôle du millénaire en cours sont essentiels.

Dans le même ordre d’idées, ATT milite pour un monde plus juste, plus équitable par le renforcement du multilatéralisme et, conformément aux propositions de l’Union africaine, pour l’idée de réformer l’ONU afin que cette organisation puisse contribuer, de manière efficace, au maintien de la paix et de la sécurité internationales, socle de tout développement.

Pour ce faire, la diplomatie malienne s’engage dans la voie tracée par les soldats de la Fédération du Mali au Congo au moment de l’accession à l’indépendance.

Une diplomatie qui reste aujourd’hui encore résolument attachée au règlement pacifique des différends internationaux.

Pour une conférence eurafricaine sur l’immigration

Parlant de la paix dans la zone sahélo-saharienne qui « représente un intérêt stratégique vital » pour le Mali et ses voisins, il a donné l’assurance que le Mali continuera à participer à toutes les initiatives pour le maintien et le renforcement de la sécurité et de la stabilité dans cet espace.

Et respectera ses engagements parmi lesquels le Pan Sahel et les différents protocoles soumis par l’Union africaine et les Nations unies pour « une lutte totale contre le terrorisme sous toutes ses formes« .

A propos de l’immigration qui, selon lui, « ne saurait être une menace, mais plutôt une opportunité« , le Chef de l’Etat propose l’organisation d’une conférence eurafricaine regroupant les pays d’origine, de transit et de destination.

La gestion des préoccupations majeures des Maliens de l’extérieur qui « requiert une diplomatie de proximité, faite d’écoute, de disponibilité, de dévouement et de courtoisie » doit être rationalisée dans le sillage du

Premier forum des Maliens travaillant dans les organisations internationales, tenu à Bamako en août 1996 et du Premier Forum de la Diaspora, tenu en octobre 2003, pour le meilleur suivi possible de la carrière des cadres maliens dans ces institutions.

Concernant l’intégration africaine que le Mali a toujours défendue depuis l’indépendance, il a la conviction que le salut du continent passe par l’accélération de son processus d’intégration en en faisant une aire de prospérité.

Dans ce monde de compétition et de mondialisation, ATT a rassuré que le Mali bénéficie de la confiance et de la sympathie des autres nations.

Les raisons de cette écoute du Mali résident, surtout depuis 1991, dans la gestion consensuelle de l’Etat et dans les fondements de sa diplomatie qui « se caractérise par son sens élevé de la mesure, de l’équilibre dans le respect des principes et valeurs qui fondent les relations internationales« .

Normal pour un pays qui, militant en faveur du développement durable autour du Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté, a participé à la création de deux fora internationaux : le Réseau de sécurité humaine et la Communauté des démocraties. Le Président a aussi rappelé les potentialités du Mali (l’or et le coton notamment).

A ce propos, il a regretté: « Nous semons du coton et récoltons des déficits, pendant que d’autres sèment le même coton, mais récoltent des subventions« . Et eu égard à ces considérations liées à la logique du marché, les pays du Sud n’arrivent pas à tirer le meilleur profit de ces atouts. Face à cette situation, les promesses de la deuxième Conférence de l’OMC attendent toujours de porter des fruits.

Le Chef de l’Etat reste cependant optimiste: « Je souhaite en 2025 une Afrique intégrée, en plein développement. Et je prends le risque réfléchi de dire que le Mali sera dans un délai raisonnable, un très grand pays céréalier et pastoral« .

A cet effet, il cite les nombreuses potentialités agro-sylvo-pastorales et halieutiques du Mali. Un pays dans lequel, si la main-d’œuvre agricole représente près de 80 % de la population, il existe plus de 600 000 exploitations agricoles.

Les fondements des mutations du secteur agricole, ce sont les innovations du projet de loi d’orientation agricole, instrument fédérateur pour que le secteur agricole devienne le moteur du développement. Ce qui assurera, sans doute, la souveraineté alimentaire, option choisie pour assurer la sécurité alimentaire.

Intégrer les valeurs maliennes à la diplomatie

C’est pourquoi, figure en bonne place des trois priorités retenues par le Président de la République, qui invite les ambassadeurs à en prendre bonne note, la sécurité alimentaire durable, en plus de l’emploi et la formation professionnelle et de la micro-finance.

Il s’agit de rendre la diplomatie « plus efficace et performante » en relevant les faiblesses structurelles de l’outil diplomatique, en discutant de la nécessaire réforme du département des Affaires étrangères, de la relecture de la carte diplomatique et du statut particulier du cadre de ce département.

« La force de votre message, du message du Mali réside aussi dans l’apport artistique, culturel et humain de notre pays, à la Civilisation de l’Universel, comme le disait le Poète-Président, Léopold Sédar Senghor« , a dit ATT aux chefs des missions diplomatiques et consulaires.

Le Président met aussi l’accent, pour accroître les performances, sur l’amélioration des conditions des diplomates, la formation des jeunes diplomates et la formation continue du personnel qui « constitue un besoin essentiel pour maintenir l’outil diplomatique à niveau« . Cette formation doit être basée sur la maîtrise des nouvelles technologies de l’information et des langues africaines et étrangères.

La diplomatie malienne doit aussi intégrer les valeurs maliennes : dialogue, tolérance, hospitalité pour « bâtir une société vivant en bonne intelligence avec ses voisins, une société résolument tournée vers le progrès et la paix, ouverte sur l’Afrique et le monde« .

Zoubeirou MAIGA

28 avril 2006.