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jpg_une-74.jpgLe Mali dispose désormais d’une loi sur la biosécurité. C’est par 108 voix pour, 20 contre et aucune abstention que les députés ont adopté hier en session plénière le projet de loi relatif à la sécurité en biotechnologie. Le vote est survenu après un débat intense qui a vu la participation d’une vingtaine d’intervenants. La discussion a revêtu les allures d’un duel entre les « pro » et les « anti » OGM, en dépit des efforts du ministre de l’Environnement et de l’Assainissement, Agathane Ag Alassane pour recadrer les enjeux et expliquer que la question était plutôt de doter notre pays d’une loi qui le mette à l’abri des effets indésirables des OGM.

Le développement sans précédent des biotechnologies représente une opportunité pour réaliser des avancées dans les domaines de l’agriculture, l’alimentation, l’environnement, la santé (humaine et animale), l’énergie, l’industrie et la foresterie. En dépit des progrès indéniables, des inquiétudes persistent quant aux conséquences de l’application de la biotechnologie sur la diversité biologique, la santé et l’environnement. C’est pour faire face à ces nombreuses inquiétudes que les pays en développement ont décidé de légiférer et de combler ainsi un dangereux vide juridique. Le Mali, par exemple, ne disposait d’aucun texte propre à le mettre à l’abri des risques liés aux activités biotechnologiques.

La nécessité s’imposait donc de prendre toutes les mesures nécessaires pour se protéger des effets néfastes de la biotechnologie moderne c’est cela que l’on appelle la biosécurité ou la sécurité biotechnologique.

UN NIVEAU ADÉQUAT DE PROTECTION

Au plan international, il existe un document appelé convention sur la diversité biologique signée en 1992. Ce texte vise la conservation de la diversité biologique, l’utilisation durable des ressources naturelles et le partage juste et équitable des avantages découlant de l’exploitation des ressources génétiques. La convention tente depuis son entrée en vigueur de gérer la prévention des risques biotechnologiques liés à la nécessité de protéger la santé (humaine et animale) et l’environnement contre les effets défavorables de la biotechnologie moderne.

L’adoption du protocole de Cartagena doit garantir un niveau adéquat de protection pour la biodiversité et la santé dans le transfert, la manipulation et l’utilisation des Organismes génétiquement modifiés (OGM) produits par la biotechnologie moderne en mettant l’accent sur les mouvements transfrontaliers. Le protocole prévoit une collaboration étroite entre les États parties. Notre pays est signataire de la convention sur la biodiversité et du protocole de Cartagena. Nous sommes ainsi engagés à l’élaboration d’un cadre national de biosécurité et d’une loi sur la sécurité en biotechnologie. Ce cadre est conçu pour garantir un niveau adéquat de protection dans le domaine du transfert, de la manipulation et de l’utilisation des organismes génétiquement modifiés issus de la biotechnologie moderne qui peuvent avoir des effets néfastes pour la santé humaine, la conservation de l’utilisation durable de la diversité biologique et l’environnement.

Avec l’appui du Programme des Nations Unies pour l’environnement, notre pays s’est doté d’un projet sur la biosécurité qui s’articule autour de l’établissement de cadres nationaux de biosécurité. Le cadre national de biosécurité se compose d’un correspondant national, point focal, de l’autorité nationale compétente, du comité national de biosécurité et de biotechnologie et du comité public pour la biodiversité.
Le correspondant national est le point de contact des notifications et assure le secrétariat technique permanent du cadre institutionnel de la gestion des questions environnementales. L’autorité nationale compétente est chargée de la délivrance des autorisations en matière de biosécurité sur la base des recommandations faites par le comité national de biosécurité. Le comité de biosécurité et de biotechnologie donne des directives à l’ANC en matière de biotechnologie et de biosécurité. Quant au comité public pour la diversité, il veille à assurer la transparence dans la prise de décisions, le suivi et la mise en application des autorisations.

Le projet de loi comporte 78 articles repartis en 14 chapitres. Il traite des dispositions générales, du cadre institutionnel de la notification, des décisions, des risques et de la gestion des risques, de la dissémination volontaire et/ou accidentelle et des mesures d’urgence. Il traite également de l’identification et de l’étiquetage des renseignements commerciaux confidentiels, de l’exportation, de la responsabilité et de la réparation, des infractions et sanctions, des voies de recours et enfin des dispositions transitoires et finales.

UNE ÉTAPE LOGIQUE DU DÉVELOPPEMENT

Le rapport de la commission du développement rural et de l’environnement, saisie au fond indique que les écoutes ont permis de conclure que la biotechnologie est une étape logique du développement de la science avec un potentiel illimité pour la satisfaction des besoins dans les domaines de la santé et de l’alimentation. La biotechnologie, lit-on dans le rapport, permet de renforcer les capacités nationales et le projet de loi, de sécuriser les exploitations. La commission recommande au gouvernement de prendre toutes les mesures pour la mise en œuvre diligente et rigoureuse du présent projet de loi.

Au cours des débats, des députés se sont inquiétés de la future application de la loi, des faibles capacités de nos structures de contrôle, d’une possible dépendance vis-à-vis des grandes firmes dans la fourniture des semences. D’autres ont perçu dans le texte, une atteinte à la diversité biologique à une introduction des OGM. Il y a aussi ceux qui ont salué l’arrivée d’une loi qui met fin à un vide juridique et qui va empêcher de faire n’importe quoi sans contrôle.

En réaction à ces interventions, Agathane Ag Alassane a démenti que le texte soit une manière d’autoriser les OGM. Pour lui, ce n’est ni pour ni contre les OGM que la loi est proposée. Mais plutôt pour doter notre pays d’un code de biosécurité qui permettra de se protéger contre les effets indésirables et faire les choix sur ce qui nous intéresse.
Pour la question des semences, il a assuré que nous n’encourons aucune dépendance. Nos chercheurs sauront produire nos semences. Ce texte va d’ailleurs permettre à nos instituts de recherche de mener librement leurs activités de recherche.

Nous reviendrons sur les suites de la plénière dans notre prochaine livraison.

A. LAM

Essor du 14 novembre 2008