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Un des porte-parole des insurgés, Eglass Ag Aguida, a déclaré hier sur une radio étrangère, la médiation d’un autre Etat : « nous voulons l’ouverture immédiate du dialogue par l’intermédiaire d’un autre Etat, parce que la confiance n’existe pas… », a – t – il déclaré.

Au même moment, au niveau de la ville de Kidal, le PAM et le Commissariat à la Sécurité Alimentaire organisent une distribution alimentaire gratuite de 150 tonnes de riz et 6 tonnes pour soulager les populations qui sont en proie à une crise alimentaire.

Au plan militaire, la situation reste calme à Kidal et dans les autres localités après les événements de la semaine dernière. Le point Selon Eglass Ag Aguida, « les insurgés ne cherchent à tuer personne« .

Très remonté, il a poursuivi : « même les militaires que les politiciens nous envoient, on ne veut pas tirer sur eux. Ce sont des maliens et qui ont leurs familles ».

A la question de savoir ce qu’il veulent exactement, il a réagi : « Nous voulons l’ouverture immédiate du dialogue par l’intermédiaire d’un autre Etat, parce que la confiance n’existe pas. Aujourd’hui, tous les officiers supérieurs qui ont quitté ne vont jamais accepter de revenir à l’armée régulière sans une autre garantie« .

Par rapport à la rencontre du jeudi 25 mai dernier entre le président de la République, Amadou Toumani Touré et les dignitaires touaregs sur les événements, pour lui, c’est sans aucun résultat. Car pense, t-il, les intéressés sont en brousse. Il a par ailleurs révélé, par rapport aux attaques de Kidal, que le Chef de l’Etat a refusé d’écouter à plusieurs reprises l’ex-chef rebelle, Iyad Ag Ghaly.

« C’est lui qui a des solutions. Et c’est lui que les ex-combattants écoutent… », a précisé Eglass Ag Aguida. Tout en niant la participation d’Iyad par rapport aux attaques, il a confirmé qu’il a quitté Kidal parce que ses tentatives de solution ont échoué.

Nous avons révélé dans notre parution du mercredi dernier que selon nos sources, Monsieur Iyad Agaly était à Bamako 72 heures avant les attaques. Selon nos sources, il avait tenté une audience avec le Président de la République. Tout porte à croire qu’il n a pas obtenir gain de cause. Et pis, la situation s’est dégénérée à son retour.

Une semaine après les tragiques événements survenus à Kidal, le voile se lève sur les intentions réelles des insurgés. Et surtout sur leur stratégie. Ce n’est plus une autonomie, mais plutôt un “statut particulier” qu’ils revendiquent pour la région de Kidal.

Dans un document, une sorte de mémorandum, intitulé “Pour un Statut Particulier de la région de Kidal » dont nous avons pu obtenir une copie, tout en apportant leur soutien au pacte national signé le 11 avril 1992 entre le gouvernement du Mali et les mouvements et fronts unifiés de l’Azawad, les insurgés prétendent attirer l’attention des autorités sur les spécificités de la région de Kidal.

Ce document dont nous publions intégralement le contenu (en page 5) retrace tous les aspects de la gestion et de la vie économique, administrative…assorti de propositions. Comme leitmotiv, ils posent la problématique : comment développer sinon administrer les régions nomades de la région de Kidal, “après un lourd cumul de retards, en gardant pour seul modèle le mode de vie sédentaire qui reste par essence l’opposé du mode de vie nomade?”.

Selon le document, “il importe d’adopter une stratégie pragmatique, flexible, respectueuse des us et coutumes des populations autochtones dans le cadre institutionnel réglementé” par une législation adaptée aux conditions de ceux qui sont concernés.

« Entre l’intransigeance sur la souveraineté nationale par laquelle pourrait être tenté l’Etat malien et la volonté de l’affirmation de l’identité des touareg de la région de Kidal, il nous semble que seul un statut particulier dûment réfléchi, accompagné d’une réelle volonté nationale de résorber le retard accumulé par les populations autochtones et le déséquilibre de développement entre la région de Kidal et le reste du pays, pourra intégrer la minorité touareg dans la construction d’un état unitaire, moderne et démocratique« , conclut le document.


Soutien des cadres touaregs

Lors de la rencontre du jeudi 25 mai dernier, les cadres touareg des régions du Nord ont réaffirmé leur soutien au Président de la République : « Nous sommes de cœur avec lui, avec tout le reste du peuple malien pour qu’on trouve une solution à ce problème« , a déclaré le député de Ménaka, Bajan Ag Hamatou, à la sortie de l’audience.

« Ceux qui ont agi comme ça, je veux parler de ceux qui ont pris les armes, n’ont aucun intérêt à rester dans cette situation. Parce que, c’est leur famille, leur population qui en souffrent« .

Signe précurseur de cette souffrance, le porte parole des insurgés a lâché hier : « Ce n’est pas facile maintenant… ».

150 tonnes vivres pour soulager la population

« Pour soulager les populations de Kidal en proie à une crise alimentaire, suite à l’attaque de la ville le mardi 23 mai dernier, le Programme Alimentaire Mondiale (PAM) et le Commissariat à la Sécurité Alimentaire ont décidé de procéder à la distribution gratuite de vivres« , nous a révélé à le représentant du PAM au Mali, Pablo Recalde.

Avant de poursuivre : « Nous allons distribuer 150 tonnes de riz, 6,2 tonnes d’huiles végétales pour 4 500 personnes pour une durée de 28 jours« , a précisé Recalde.

La région de Kidal, selon un document officiel compte 49 330 personnes dont 25 934 hommes et 23 396 femmes. « Aujourd’hui, nous manquons de tout… Après quatre jours, nous avons utilisé toutes nos provisions« , a déploré une habitante de Kidal, Mme Fadimata Wallet Mohamed qui a été jointe au téléphone.

Elle insiste : « si ça continue, nous allons vers la catastrophe. Car les gens ont peur de sortir« . Malgré les appels à la sérénité et à la reprise des activités, les populations, par crainte de représailles, refusent toujours de sortir, a témoigné un autre habitant de Kidal.

Mme Fadimata Walet a souligné que la ville s’est vidée de ses populations : « les gens sont parties se réfugier dans les montagnes et, ils ont peur de retourner par crainte d’être considérés comme des rebelles« .

Un responsable du gouvernorat qui a requis l’anonymat a révélé que les casses et pillages continuent toujours. Il n’a pas donné un bilan.

Selon Pablo Recalde, les portes des magasins du PAM ont été défoncées…. « 15 tonnes de riz et 8 tonnes d’huile végétale ont été pillées« , note t-il, tout en minimisant l’impact.

La ville de Kidal, avant les attaques du 23 mai 2006, connaissait déjà une pénurie alimentaire. Anara Ag Mohamed, assistant de programme et responsable du volet sécurité alimentaire à l’ONG Action Contre la Faim (ACF), tirait sur la sonnette d’alarme : « il y a pénurie de céréales à Kidal. Nous avons pour nos 13 coopératives 45 millions de FCFA, mais faute de disponibilité de céréales, on n’arrive pas à approvisionner nos banques de céréales« , s’est-il indigné.

Almahady Moustapha Cissé

L’intégralité des revendications des insurgés

Désireux d’aboutir à une solution pacifique négociée, juste et définitive des différents problèmes qui surgissent de façon récurrente dans la région de Kidal, une solution qui tienne compte des diversités culturelles, géographiques et socio-économiques qui existent dans la République du Mali et, en même temps, une solution qui tende à la consolidation de l’unité et de l’intégrité nationales

Réaffirmant leur attachement à la Constitution de la République du Mali en date du 12 janvier 1992, Soulignant les dispositions de la Constitution de la République du Mali par lesquelles elle souscrit à la Déclaration Universelle des Droits de l’Homme du 10 décembre 1948 et à la Charte Africaine des Droits de l’Homme et des Peuples du 27 juin 1981, et proclame sa détermination à défendre les droits de la femme et de l’enfant ainsi que la diversité culturelle et linguistique de la Communauté Nationale, Considérant le pacte national signé le 11 avril 1992 entre le Gouvernement du Mali et les Mouvements et Fronts Unifiés de l’Azawad et ses difficultés d’application, Nous attirons l’attention des autorités sur les spécificités de la région de Kidal : La Région de Kidal

La région de Kidal s’étend sur une superficie de 260 000 km2 et occupe 21,27% de la superficie totale du pays. C’est la région la plus pauvre du Mali avec un taux pauvreté de 92% C’est la moins peuplée du pays et est occupée par une minorité.

Elle est la plus enclavée, elle n’a aucun accès fluvial, ni goudron ni aéroport. Elle est située dans une zone entièrement désertique. Elle est la dernière née des régions du Mali (1993)

Elle est la seule région à avoir subi de plein fouet les conséquences de deux grandes sécheresses (1973 et 1984) et deux rébellions (1963 et 1990). Elle est la seule à vivre exclusivement de l’élevage

Elle est la plus éloignée du centre de décisions nationales (1600 Km). Le pouvoir traditionnel Nous avons toujours eu un pouvoir traditionnel fort qui gère la région de façon consensuelle.

Il est important que l’Etat le reconnaisse et qu’il mette à sa disposition les moyens nécessaires à l’exercice de son autorité sur son territoire.

De l’administration

La bonne gouvernance ne doit pas être considérée que sous l’angle de la finalité économique mais aussi sous l’angle social. « La réduction des inégalités devrait être aussi un élément constitutif de la bonne gouvernance« .

Afin de réparer ces inégalités, les administrations comme celle des Etats Unis d’Amérique ont procédé à « la discrimination positive » des minorités touchées, et d’autres comme la France ont adopté « un statut particulier » pour les régions concernées.

La marginalisation des nomades est ressentie comme un désintéressement de l’administration à leur sort. Les administrateurs sont dans la plupart des cadres sédentaires et ne se rendent pas chez les nomades, ces derniers méfiants évitent l’administration.

Il est difficile d’administrer les nomades à partir d’un bureau. Faire chercher les nomades quand on a besoin d’eux n’est pas la solution, un proverbe touareg dit : « awa tarhed itart awa wartarhed soutart« . « Ce que tu veux, cherche-le, ce dont tu n’as pas besoin fais-le chercher » .

Pourquoi ne pas insérer dans les tâches mensuelles des administrateurs une tournée obligatoire dans les campements d’au moins quelques jours pour mieux connaître le territoire et les populations qu’ils administrent ?

Les administrateurs civils sont formés pour administrer les sédentaires et non les nomades donc les autochtones sont mieux placés pour comprendre, appuyer et conseiller les nomades.

Les critères de diplômes doivent être considérés au même titre que ceux de l’expérience dans le milieu. Aussi, la représentation des touaregs de la région de Kidal, en tant que minorité visible et peuple autochtone, dans le gouvernement et tous ses démembrements, garantie par la constitution de façon irréversible, est une revendication légitime.

Système électoral

Faut-il repenser le système électoral en zone nomade ? Il est difficile d’accéder aux nomades, par leurs occupations, le système classique d’élections ne leur est pas accessible. Les élections en milieu nomade impliquent plus de charges qu’en milieu sédentaire. Les bureaux de vote itinérants supprimés lors des dernières élections législatives de 2002 par la Cour constitutionnelle sont très adaptés à la région et au mode de vie nomade.


Du développement

La région de Kidal n’a pas toujours bénéficié d’investissements à la mesure de sa spécificité ; ni de priorité dans l’allocation des ressources. La politique nationale d’investissement héritée de la colonisation a continué de privilégier et de fonder la localisation des activités économiques sur le potentiel naturel, d’où une tendance à investir dans les zones à fortes potentialités électorales du sud.

Lors de la table ronde des bailleurs de fonds de Tombouctou – organisée par le gouvernement malien et le PNUD en mars 1998 – , il a été fait le constat suivant : * Aujourd’hui il est reconnu qu’une des causes fondamentales de la rébellion au Nord est la mauvaise gouvernance et l’insuffisance des actions de développement dans ces régions considérées comme déshéritées. *

De sorte qu’aujourd’hui, à la problématique immédiate de l’éradication des causes profondes du conflit du Nord, s’ajoute celle, plus latente, de la réhabilitation du développement économique de ces régions. Autrement formulée, cette problématique a une double nature: * celle, économique d’une meilleure coordination entre partenaires en vue de la relance économique des régions du Nord ; * celle, institutionnelle, de la recherche de formules adaptées de programmation et de financement des actions de réhabilitation de développement dans le cadre de la décentralisation.

Pour les planificateurs centraux, en disposant d’une enveloppe financière qui peut sauver soit 100 enfants d’un village ou 20 enfants nomades, la décision à prendre va pour le grand nombre. Cependant, la faible densité, les longues distances entre les différents campements et leur dispersion font qu’il est difficile de gérer une fraction nomade comme un village, sans tenir compte des spécificités et des particularités du mode de vie nomade dans le domaine de la santé publique et de l’éducation.

Dans la région de Kidal, jusqu’à présent, certaines personnes vulnérables font plus de 200 kilomètres pour recevoir les premiers soins. La soif tue des citoyens chaque année dans la région et la barrique d’eau de 200l coûte 1000 FCFA en moyenne dans la ville de Kidal. La quasi-totalité des produits de première nécessité nous viennent de façon informelle du pays voisin, avec lequel aucune garantie par les accords trans-frontaliers n’est assurée. La rentabilité économique est aussi importante que la rentabilité sociale car l’exclusion est la source de conflits.

Pastoralisme

Au Mali le pastoralisme, victime de la législation, est sans cesse repoussé par l’agriculture vers des zones peu productives. Il est couramment admis que toute terre non cultivée est vacante de sorte que pour peu qu’un agriculteur plante quelques tiges de mil quelque part, la terre lui revient et il pourra y exercer un droit foncier.

Quant à l’éleveur, ses territoires de pâturage ainsi que celles de ses ancêtres ne lui étaient reconnus par aucun texte juridique. Quelle que soit la richesse d’un éleveur, son cheptel ne lui sert d’aucune garantie contrairement au cultivateur pour son lopin de terre, au niveau des institutions financières.

Pourquoi ne pas créer des secteurs d’éleveurs, au niveau de chaque commune rurale nomade, reconnus par la législation et consacrant l’appropriation de l’espace pastoral par ses utilisateurs ? Ces secteurs pourront être dirigés dans la plupart des cas par des chefs de fractions influents, ce qui fera le compromis entre l’organisation traditionnelle autochtone de la société et la nécessité moderne de l’exigence démocratique et de développement décentralisé.

Education et Culture

Le système éducatif national n’est pas adapté au mode de vie et aux besoins des populations de la région. De religion musulmane et de culture arabo-berbère, les touareg préfèrent être scolarisés dans les trois langues ( Français, arabe et tamazight). Jusqu’à présent l’handicap majeur pour la scolarisation des enfants est le manque d’éducation islamique à l’école et la séparation des garçons et des filles.

Le Tifinagh est l’écriture authentique des touaregs. Il est regrettable que le pays s’investit dans de vastes projets d’alphabétisation fonctionnelle utilisant les caractères latins au bénéfice d’un peuple qui possède sa propre écriture. « Il est certain qu’une telle politique ne fera que contribuer, à long terme au déclin et à la disparition du Tifinagh« .

La promotion de la culture régionale n’est pas faite par l’Etat à travers ses médias. Les populations ne font que subir les agressions des autres cultures.


Santé

La région est la seule à n’avoir aucune structure sanitaire fiable (hôpital, laboratoire, pharmacie…). Elle ne dispose que de 4 centres de santé, c’est-à-dire 1 pour 60 000 km2.

Le système de santé doit être adapté au mode de vie des populations par des équipes mobiles d’intervention en milieu nomade.

Emploi

Le principal malaise ressenti par les populations est le chômage. Environ 70% des jeunes sont en chômage. Les conditions de recrutement sont identiques pour le nord et pour le sud, sans tenir compte du retard socio-éducatif accumulé par la région depuis plus de 40 ans.

De la sécurité

Les services techniques classiques chargés de la sécurité intérieure ont montré leurs limites opérationnelles dans les zones nomades. De sorte que la nature ayant horreur du vide, certains leaders ont prouvé leur efficacité dans des contrées d’accès difficile et éloignés.

Pourquoi ne pas intégrer ces ressources humaines disponibles et responsables dans le dispositif sécuritaire de la région en leur donnant les moyens matériels et financiers pour mener à bien leurs missions ?

Le système sécuritaire au niveau de la région est à reformuler, compte tenu de l’étendue du territoire, la dispersion des populations et la porosité des frontières.

De la Justice

Les différents litiges sont réglés par le qadi et en dernier recours l’autorité traditionnelle selon la jurisprudence islamique.

Conclusion

Pendant la dernière décennie, le Mali a connu des grands changements dans son environnement sociopolitique et économique dus à des réformes tendant à une plus large vision de la démocratie, de la décentralisation et une réflexion qui se veut participative pour l’élaboration d’une stratégie nationale de développement durable.

Ainsi la pauvreté, la santé, l’éducation et la justice ont été autant de thèmes qui impliquent désormais des acteurs à la base pour une gestion saine et équitable des affaires publiques. La cheville ouvrière de toute cette chaîne demeure les collectivités territoriales décentralisées qu’il faut absolument préparer aux rôles qui leurs sont dévolus et renforcer leurs capacités à travers une société civile forte pour réussir la mise en œuvre de tout le processus de décentralisation et du développement.

Dans ce contexte, comment développer sinon administrer les régions nomades de la région de Kidal, après un lourd cumul de retards, en gardant pour seul modèle le mode de vie sédentaire qui reste par essence l’opposé du mode de vie nomade ?

Ce faisant, il importe d’adopter une stratégie pragmatique, flexible, respectueuse des us et coutumes des populations autochtones dans le cadre institutionnel réglementé par une législation adaptée aux conditions de ceux qui sont concernés.

Entre l’intransigeance sur la souveraineté nationale par laquelle pourrait être tenté l’Etat malien et la volonté de l’affirmation de l’identité des touareg de la région de Kidal, il nous semble que seul un statut particulier dûment réfléchi, accompagné d’une réelle volonté nationale de résorber le retard accumulé par les populations autochtones et le déséquilibre de développement entre la région de Kidal et le reste du pays, pourra intégrer la minorité touareg dans la construction d’un Etat unitaire, moderne et démocratique.

Source Kidal Info

Nord-Mali : où sont donc passés les Américains ?

Au lendemain des attaques perpétrées contre les camps militaires du Nord, le Pentagone fut l’objet de commentaires peu flatteurs de l’opinion nationale malienne. Les raisons. La coopération militaire entre le Mali et les Etats-Unis a timidement commencé à prendre de l’envol après la chute du régime du Général Moussa Traoré et elle était plus encline à des actions humanitaires.

La construction de centres de santé et quelques campagnes de vaccination étaient alors les axes modèles de cette coopération qui s’élargit, un peu plus tard à des opérations de maintien de la paix. Mais l’après 11 septembre 2001 bouscula l’ordre des choses.

Le terrorisme se rependait à travers le monde, et l’Afrique ne faisait pas exception. Ainsi, dans la cartographie des zones à risque se trouvait le Mali, particulièrement sa partie septentrionale.

Notre pays qui se trouve dans la bande sahélienne où la contagion terroriste avait commencé à montrer des signes inquiétants à travers des prises d’otage et d’autres coups d’éclat a accueilli de unités antiterroristes américaines. « Pan Sahel initiative » était née.

Ce programme militaire financé par le département d’Etat américain concernait outre le Mali, la Mauritanie, le Niger et le Tchad. Il visait à renforcer les contrôles frontaliers contre le trafic des armes et de la drogue ainsi que le mouvement des terroristes transnationaux. Des forces américaines du commandement d’opérations spéciales basé en Europe entraînaient des unités militaires du Mali et de la Mauritanie à la mobilité, aux communications, aux mouvements sur terre et tactiques de moyennes unités.

« Pan Sahel initiative » visait au départ à assister le Mali, le Niger, la Mauritanie et le Tchad à détecter et réagir aux mouvements suspects de personnes et de marchandises. Mais ses objectifs soutiennent deux intérêts de la sécurité nationale américaine en Afrique : la guerre contre le terrorisme et la stabilité régionale. L’un des succès du programme fut la capture de Abderrazak al Para, une des figures de proue du groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) qui avait donné du fil à tordre aux autorités algériennes.

Malgré ce que certaines sources proches des milieux militaires américains qualifient de succès, « Pan Sahel initiative » a connu des contraintes dues au faible financement. Cependant, le Pentagone entendait étendre l’expérience à des pays comme le Maroc, l’Algérie, la Tunisie, le Sénégal et le Nigeria.

Selon des sources concordantes, de faibles unités de soldats américains continuent à traquer les terroristes dans l’immense désert saharien entre l’Algérie, le Mali et la Mauritanie. Les Maliens étaient restés de façon générale circonspects face à cette présence des Américains au Nord Mali, jusqu’à la semaine dernière.

Quand des garnisons militaires ont été attaquées à Kidal, le sentiment partagé était que les « GI’s » présents dans le septentrion malien n’ont pas fait leur travail. Aussi, ce qui s’est passé au Nord du Mali semble démontrer une défaillance du programme de coopération militaire auquel le Mali a volontiers souscrit.

Certaines questions ayant trait aux escarmouches entre les forces loyalistes et les soi-disant rebelles mettent indirectement en cause la crédibilité de « Pan Sahel initiative ».

Comment les rebelles se sont-ils armés ? Qui les soutient ? D’où sont-ils venus ?

En situation normale, « Pan Sahel initiative » aurait pu trouver des réponses à ses questions, et mieux, prévenir les attaques perpétrées, comme le garantit l’accord de coopération.

Le Pentagone, s’il opère réellement au Nord du Mali, a tout simplement flanché. La question qui demeure est de savoir si les autres pays concernés par « Pan Sahel initiative » mettront en branle leurs systèmes coopératifs pour contenir le mal qui vient de sévir au Mali.

Ismaïla Diarra

29 mai 2006.