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Du haut de la tribune des Nations Unies, le vendredi 27 septembre dernier, le président de la République, Ibrahim Boubacar Kéita, a fustigé les manœuvres dilatoires des groupes armés du Nord du Mali qui annonçaient récemment la suspension de leur participation au processus de mise en œuvre de l’Accord de Ouagadougou. Il a dénoncé la violation flagrante de l’Accord par ces mêmes groupes. Pour IBK, le gouvernement poursuivra ses efforts en vue d’un règlement pacifique de la crise dans le septentrion sans céder à quelque chantage que ce soit. Et sans qu’il soit besoin de le «bousculer».

La Coordination du Mouvement National de Libération de l’Azawad (MNLA) et du Haut Conseil pour l’Unité de l’Azawad (HCUA), rejointe par le Mouvement Arabe de l’Azawad (MAA), ont informé récemment l’opinion nationale et internationale que « suite aux graves et multiples difficultés de mise en œuvre de l’accord de Ouagadougou causées par le non respect des engagements dudit accord, notamment à travers la violation unilatérale du cessez-le feu par la partie malienne, la poursuite des exactions militaires sur les civils azawadiens et la poursuite des arrestations arbitraires, la non libération des détenus politiques suite au conflit, la violente répression de la manifestation des femmes à Kidal, l’agression des positions militaires du MNLA à Foyta, dans la zone de Léré, les déclarations belliqueuses du nouveau président malien, élu à la faveur de l»accord de Ouagadougou et pour laquelle (élection) le MNLA, conformément à ses engagements, a garanti la sécurité et le bon déroulement (des opérations) dans les zones sous son contrôle « . En conséquence, précise le communiqué des groupes armés, la coordination du MNLA et HCUA, rejointe en cela par le MAA, a décidé de suspendre toute participation à la mise en œuvre de l’accord cadre de Ouagadougou, et ce, jusqu’à nouvel ordre.

Cette suspension est intervenue, le 18 septembre 2013, à la suite de la deuxième réunion du Comité de Suivi et d’évaluation dudit accord et de la déclaration du président IBK affirmant avec fermeté que « à l’exception de l’indépendance, du fédéralisme et de l’autonomie, tout est négociable… ». Cette déclaration, précisent les groupes rebelles, « rend nulle et non avenue la participation des mouvements de l’Azawad à toute discussion dans la mesure où elle implique explicitement qu’il n’y a strictement rien à négocier « .

C’est dans ce contexte que le président de la République est intervenu, le vendredi 27 septembre, à la tribune de la 68 ème session de l’Assemblée générale de l’Onu à New-York.

Le Mali est de retour

IBK réaffirmera avec force et de façon répétitive que le Mali est de retour avec l’appui des pays amis ; que le Mali est debout et tourne la page la plus sombre de son histoire. Celle-ci a été marquée par neuf mois de graves violations des droits humains, de pillages, et de destruction de sites et monuments culturels et historiques uniques.

Aujourd’hui, dira le chef de l’Etat, le Mali a recouvré sa souveraineté sur l’ensemble de son territoire et s’est engagé sur le chemin de la paix et de la réconciliation nationale à travers l’Accord préliminaire de Ouagadougou, signé le 18 juin 2013.

Pour IBK, en tant que président investi de la confiance de l’ensemble du peuple malien, il mesure l’immensité des défis à relever et des aspirations profondes de ses compatriotes à la paix, à la réconciliation nationale et au développement économique et social. C’est pourquoi, il a pris l’initiative de rencontrer à Bamako les chefs des groupes armés du Nord pour leur rappeler les principes sacro-saints du respect de l’intégrité territoriale du Mali et de la laïcité de l’Etat. Il a rappelé avoir insisté sur la possibilité de discuter de tous les sujets à l’exception de toute forme d’indépendance, de fédéralisme ou d’autonomie.

« Mon message a été entendu et nous nous engageons très bientôt dans un dialogue pour un règlement définitif des crises dans le Nord de notre pays. Dès à présent, je veux relancer le dialogue intra et intercommunautaire pour recréer les conditions du vivre-ensemble entre toutes les Maliennes et tous les Maliens. Des Etats Généraux de la décentralisation seront convoqués en vue de créer les conditions nécessaires à un transfert effectif de compétences et de ressources aux collectivités territoriales, sur l’ensemble du territoire « , a-t-il déclaré.

Violation de l’Accord de Ouaga

Le chef de l’Etat a toutefois dénoncé la décision des groupes armés de suspendre leur participation processus de mise en œuvre des dispositions de l’Accord préliminaire de Ouagadougou. Il a exprimé son engagement à aller vers le dialogue mais sans devoir céder à un quelconque chantage. C’est dans ce sens qu’il a annoncé que le gouvernement tiendra bientôt les assises nationales du Nord.

« D’ores et déjà, dans la perspective des discussions à venir avec les groupes armés, et dans le but de créer les conditions d’un apaisement, il a été procédé à la mise en œuvre de mesures de confiance énoncées par l’Accord préliminaire de Ouagadougou, notamment la libération de prisonniers non détenus pour crimes de guerre, et la sensibilisation des populations sur les dispositions pertinentes de l’Accord préliminaire « , a expliqué IBK.

Il a, en outre, indiqué que dans le cadre de la lutte contre l’impunité, une place de choix a été faite à la justice nationale. Ainsi, le ministre de la Justice, Garde des sceaux, est la deuxième personnalité du gouvernement, en vue de l’édification d’un véritable Etat de droit au Mali. De même, la Commission dialogue et réconciliation sera reconvertie en Commission dialogue, vérité et réconciliation, en vue de panser les plaies encore béantes de la société malienne.

Les crises cycliques dans les régions septentrionales du Mali, a ajouté IBK, trouvent leur explication profonde dans les conditions de vie précaires des populations et la pauvreté générale. Un ministère chargé de la réconciliation nationale et du développement des Régions Nord a été créé en vue d’accélérer le développement, en matière de santé, d’éducation et d’infrastructures.

Pour le nouveau locataire du palais de Koulouba, malgré l’espoir suscité par les succès des opérations militaires menées à travers l’action conjuguée de l’Opération Serval, des troupes de la MISMA et des forces armées et de sécurité tchadiennes et maliennes, le déplacement de groupuscules armés terroristes et rebelles vers d’autres pays voisins représente une menace sérieuse pour la stabilité et l’intégrité territoriale du Mali, ainsi que pour la paix et la sécurité dans la région.

Les efforts pour le développement

Il a alors insisté sur l’engagement du Mali à œuvrer sans relâche à la mise en œuvre de la Stratégie des Nations Unies pour le Sahel pour un règlement concerté de cette crise sécuritaire. Le Mali, a-t-il indiqué, est résolument déterminé à œuvrer pour la redynamisation des mécanismes de coopération sous-régionaux existants. De même, l’accompagnement de la communauté internationale s’avère indispensable dans la lutte contre le terrorisme transnational dans le Sahel. « Les enjeux sont énormes et la menace terroriste prend des proportions inquiétantes, au point qu’aucun pays n’est à l’abri d’actes violents et barbares », a souligné IBK. Il n’a pas manqué de citer la récente attaque terroriste survenue à Nairobi au Kenya.

Abordant le thème de cette session de l’Assemblée générale des Nations unies, « Le programme de développement de l’après 2015 : plantons le décor« , IBK a plaidé pour l’accentuation des efforts pour le développement notamment en faveur des pays pauvres. Dix ans après l’adoption des Objectifs du Millénaire pour le Développement (OMD), a-t-il rappelé, les chefs d’Etat et de gouvernement, réunis à New York en septembre 2010, dans le cadre de l’évaluation à mi-parcours de l’initiative, ont exprimé de vives préoccupations face aux résultats insuffisants. Et IBK d’appeler la communauté internationale à l’instauration d’un système commercial et financier ouvert et équitable ainsi que le respect des promesses faites aux pays les moins avancés, aux pays en développement sans littoral et aux petits Etats insulaires en développement.

Bruno D SEGBEDJI

L’Indépendant du 30 Septembre 2013