Grandeur et décadence « des fous de la démocratie »
L’Association des jeunes pour la démocratie et le progrès (AJDP) fête mercredi 15 octobre le 18e anniversaire de sa création. Un anniversaire qui se déroule dans un contexte de morosité pour cette association, pionnière de la démocratie dans notre pays.
L’AJDP est la toute première association des jeunes à défier le régime totalitaire du général Moussa Traoré en 1990 : en initiant une marche le 15 octobre 1990. On peut même dire que les mouvements de 1991 qui ont conduit à la chute du régime de Moussa Traoré et à l’instauration de la démocratie et du multipartisme intégral ont commencé avec eux. Ils ont accepté être des martyrs pour qu’il y ait enfin un changement dans la manière de diriger le pays.
En son temps, rares étaient ceux qui osaient exprimer leur mécontentement à plus forte raison de le manifester publiquement sous forme de marche. Cela leur a valu le nom de « fous de la démocratie du 15 octobre 1990 ». Cette marche pour plus de liberté, de démocratie qui fut réprimée et les initiateurs arrêtés est à l’origine de la création de l’Association des jeunes pour la démocratie et le progrès (AJDP).
Ce jour-là, des jeunes ont marché dans les rues de Bamako avec des banderoles et pancartes pour dire non à GMT. Cette première action de l’AJDP a été suivie par d’autres manifestations violentes d’élèves, de grèves de travailleurs, de casses de commerçants du Dabanani, de marches d’associations et regroupements politiques, entre autres…
Quelques mois après cette première marche de 1990, les événements ont abouti au soulèvement du peuple malien et au 26 mars 1991 grâce à l’action combinée du Mouvement démocratique, de la société civile et d’officiers patriotes, le Mali recouvrait la liberté et la démocratie.
Après le changement de régime en 1991, l’Association, alors dirigée par Moussa Kéita, a été membre du Comité de transition pour le salut du peuple (CTSP). L’organisation était de taille à l’AJDP. Partout à Bamako, des comités ont existé pour le bonheur des jeunes.
Siège squatté par des artistes
Les membres fondateurs ont abandonné leurs fauteuils soit pour des raisons professionnelles soit pour limite d’âge. D’autres, dont le président fondateur Moussa Kéita (parti aux Etats-Unis d’Amérique) ont émigré sous d’autres cieux.
Mais dix-huit ans après, que reste-t-il de cette association ? Après le départ des initiateurs, un nouveau bureau a été constitué. L’association dirigée par Youssouf Maïga depuis plus d’une décennie vit des moments difficiles. Aucune activité statutaire ne se tient plus si ce n’est de rares conférences débats. Bien qu’ayant participé pleinement à la mise en place du Conseil national de la jeunesse du Mali, le bureau n’arrive pas à se réunir convenablement.
Ses membres s’il y en a encore préfèrent vaquer à leurs propres occupations. La majorité des membres est tout simplement atteinte par la limite d’âge. Mais beaucoup d’anciens « refusent » de partir et s’accrochent à tout prix.
Ayant pour président d’honneur, le chef de l’Etat ATT, l’AJDP devait se sentir mieux. C’est loin d’être le cas. Elle n’a pas de siège digne de ce nom. L’actuel siège domicilié à la Maison des jeunes est occupé par des fabricants de « bogolan » et autres artisans et artistes.
Le président Youssouf Maïga avec quelques camarades essaye tant bien que mal de maintenir l’Association en vie. Cependant, en sa qualité de chargé de mission dans un ministère, M. Maïga consacre légitimement plus son temps à son travail qu’aux activités de l’AJDP.
Mais ne l’oublions pas : l’Association a fait la pluie et le beau temps. Qui ne se souvient pas de son journal, « La Patrie », de ses sorties inopinées pour régler la circulation à Bamako lors d’une grève des policiers.
Vivement la renaissance du Phénix !
Amadou Sidibé
14 Octobre 2008