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Mercredi, Bamako s’est réveillé avec un ciel couvert de gros nuage. Des initiés ont su que la capitale malienne allait vivre un grand événement d’ici la tombée de la nuit. Et quand le soleil entama la deuxième moitié de sa course quotidienne, la nouvelle comme une trainée de poudre s’est repandue dans la capitale : le généralissime Amadou Haya Sanogo fut cueilli à froid comme un fruit mûr à son domicile à l’ex-base aérienne. Ce n’était point une intox de plus, une réalité. Jeté dans une cellule de l’école de gendarmerie de Faladiè, Haya, aurait déjà donné des noms de personnes pouvant le rejoindre sous le même chef d’accusation : complicité dans l’enlèvement de personnes.

A défaut d’obtempérer d’une manière intelligente et diligente, le putschiste du 22 mars 2012 fut amené de force par les éléments de la Force spéciale de la gendarmerie, qui l’ont trimbalé comme un « vulgaire bandit » devant le juge Yaya Karambé. C’est en exécution du mandat d’amener lancé par le deuxième cabinet d’instruction du pôle économique sous le TPI de la CIII . Dans une cellule de l’école de gendarmerie de Faladjé, où il a été entendu pendant quelques heures avant d’y être maintenu sous mandat de dépôt, privé de toutes libertés, Monsieur Amadou Haya Sanogo s’est mis à table. Même si le gouvernement dans une déclaration livrée mercredi soir par son porte-parole, n’a évoqué qu’un seul chef d’accusation, à savoir complicité d’enlèvement de personnes, cette affaire regorge des intitulées aussi graves que poignantes. Assassinats, complicité d’assassinats, séquestrations …

Les faits remontent aux événements du 30 avril 2012. Où des éléments du 33ème Régiment des commandos parachutistes (RCP) de Djicoroni Para, alors commandé par le colonel Abdine Guindo ont été arrêtés et tués au motif de tentative de « contre coup d’Etat ». Parmi lesquels, des rescapés, qualifiés de proches du général Amadou Toumani Touré, ont fait l’objet de véritable chasse à l’homme pendant des mois, par des éléments en uniforme qui obéissaient à l’aveuglette aux instructions de « l’ex-sultan de Kati ». Certains éléments arrêtés et présentés à la télévision comme des mercenaires ont disparus de l’écran jusque-là.

Il faut rappeler que les événements de 30 avril faisaient suite à une déclaration va-t-en guerre du général Amadou Haya Sanogo, alors capitaine et incontestable chef de la junte.

C’était à la suite d’une autre déclaration de la CEDEAO qui faisait du président Dioncounda Traoré, le Président intérimaire de la transition, au terme du délai constitutionnel des 41 jours. On retient de cette déclaration musclée de Haya certaines expressions comme : « …Pas un seconde de plus. A la fin des 41 jours, je prendrais toutes mes responsabilités… ». Ce jour-là, les initiés ont commencé à eu peur, mais les incrédules s’en réjouissaient. L’inquiétude des anciens se justifiaient. Car, la déclaration avait valeur d’annonce de nouveau coup de force contre les Institutions de la Transition. Et, cela ne pouvait se réaliser sans conséquences graves. Donc, les événements du 30 avril étaient prévisibles. Surtout que la garde présidentielle était assurée par les bérets rouges. Ces derniers ont donc décidé de faire régner l’ordre dans la capitale, en essayant de faire libérer l’ORTM et l’Aéroport des mains des hommes de Kati. Du coup l’irréparable s’est produit. Les deux corps s’affrontèrent. Les bérets rouges, moins nombreux et peu armés mordent la poussière. Certains de leurs éléments furent prisonniers, des blessés enlevés dans les hôpitaux de Bamako ont été transportés dans les violes de Kati. Certains disparaissent pour toujours. Ce sont ces assassinats extrajudiciaires se produisirent.

Qui sont-ils responsables des crimes commis ?

Les dossiers des événements du 30 septembre dernier, ne sont pas encore ouverts. Mais, certainement, ce ne serait plus pour longtemps. Si l’on se réfère à la détermination du procureur général du Tribunal de la Commune III, Daniel Tessougué, qui a aujourd’hui le soutien de l’ensemble de la famille judiciaire dans cette croisade contre l’impunité.

Mais, le général Amadou Haya Sanogo va-t-il tomber seul ? Pas sûrement. Il a certainement bénéficié de l’accompagnement de la hiérarchie militaire d’alors, notamment l’ex-ministre de la Défense et des anciens combattants, Gal Yamoussa Camara, le chef d’Etat-major général des armées, Gal Ibrahim Dahirou Dembélé et le directeur de la Sécurité d’Etat, Gal Sidi Allassane Touré. Si de part sa position, le troisième est très peu visible sur la scène par contre les deux autres étaient très en verve au moment des faits. Yamoussa Camara n’a-t-il pas croisé le fer avec le Président de la République par intérim et le Premier ministre de la Transition dans ce dossier. A la télévision, il ne cessait de dispenser des cours du règlement militaire à qui veut l’entendre.

Déjà, il semblerait que la peur habite désormais leur camp. Et, c’est de bonne guerre, car dans sa déposition du mercredi dernier, il aurait commencé à lâcher des noms.

Concernant le général Abdoulaye Koumaré, son nom est fortement cité dans des arrangements qu’il a effectués en faveur de son mentor dans la disparition de certains éléments opposés à Sanogo, lors des événements du 30 septembre. Décidément la date du 30 semble être un jour pas ordinaire pour le général. Tous les deux événements qui le concerné ont éclaté un 30 du mois. Attendons le 30 novembre prochain pour tirer une conclusion.
Affaire à suivre

Mohamed A. Diakité

Tjikan du 29 Novembre 2013