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La Cour d’assises en transport à Ségou a jugé l’Affaire BHM et a condamné les deux accusés à des peines lourdes, sans circonstances atténuantes : la réclusion à perpétuité pour l’ancien PDG de la banque Mamadou Baba Diawara, et 15 ans de réclusion pour le PDG de WAIC (une société immobilière) Ismaïla Haïdara. Les avocats de la défense ont formé un pourvoi en cassation devant la Cour suprême.

Le vendredi 18 juillet 2008 est une date qui restera gravée dans les mémoires à Ségou, tant la sentence prononcée par la Cour d’Assises de Bamako en transport à Ségou (3é session ordinaire du 7 au 17 juillet 2008) a semé la terreur chez les parents, alliés et proches de Mamadou Diawara, ancien Président Directeur Général de Banque de l’Habitat du Mali (BHM) et de Ismaïla Haïdara, PDG de West African Investment Com-pany (WAIC).

Il est reproché aux accusés Mamadou Baba Diawara et Ismaïla Haïdara le détournement de 6 213 683 091 F Cfa. Mamadou Diawara, Président Directeur Général de Banque de l’Habitat du Mali (BHM) à l’époque, est accusé d’avoir accordé à la société anonyme WAIC, en violation de la procédure en la matière d’octroi de crédits, des sommes d’argent provenant de la banque, d’un montant total de la somme susmentionnée.

Tandis que Ismaïla Haïdara, PDG de West African Investment Company (WAIC) est accusé de s’être rendu complice d’atteintes aux biens publics.

Le premier a été condamné à la réclusion à perpétuité, le second à 15 ans de réclusion et à 500 000 Francs d’amende chacun.

En matière civile, ils ont été condamnés à verser à la Banque de l’Habitat du Mali (BHM), la somme de 6 213 683 091 F Cfa au principal et 700 millions à titre de dommages et intérêts.

Cette condamnation, qui a comblé les attentes de la partie civile et du parquet, a été jugée particulièrement lourde par la défense et la douleur était grande face à ce coup dur de la justice qui a frappé de toutes ses forces en n’accordant aucune circonstance atténuante.

Aussitôt Me Mamadou Gakou, le doyens des avocats de la défense a formulé un pourvoi en cassation auprès de la Cour Suprême du Mali. «Je développerai avec mes autres confrères de la défense les arguments tendant à casser cette décision très sévère afin qu’elle soit reprise par une autre Cour d’Assises », nous a confié Me Mamadou Gakou.

La loi donne aux condamnés en assises la possibilité de se pourvoir en cassation dans les trois jours qui suivent la condamnation. Toutes choses que les avocats de la défense, qui ont défendu avec détermination leurs clients, ne se priveront pas de faire.

Les avocats de la défense comprenaient Mes Mamadou Gakou, Mariam Diawara, Amidou Diabaté, Mahamadou Traoré, Mbandy Yattassaye (pour Mamadou Baba Diawara) et Mes Mamadou Tounkara et Souleymane Adamou Cissé (pour Ismaïla Haïdara).
Le plaignant M. Waïgalo, Conseiller spécial de la BHM était assisté par le Cabinet Bryslla avec des avocats comme Mes Ba Salif Sylla et Hamidou Koné.

Lors de ce procès, les avocats de la défense se sont battus avec détermination en faisant face au rouleau compresseur de la justice, menée par le président de la Cour Abdoulaye Issoufi Touré et le Procureur général près la Cour d’Appel Mahamadou Bouaré, dont la détermination était visible tout le long du procès.

La défense a contesté la régularité des éléments sur lesquels le juge s’est basé pour rendre son arrêt.

Notamment le rapport d’expertise sur l’évaluation des réalisations faites par WAIC sur les titres fonciers à Sébénikoro. Ce rapport dressé par des experts de l’Urbanisme évaluant les réalisations à 3 milliards de Fcfa, a été plusieurs fois contesté par les avocats de la défense qui ont demandé une contre expertise sans jamais l’obtenir.

« C’est un rapport qui a été élaboré dans des conditions totalement irrégulières. Dans ce rapport, il ne ressort pas du tout le montant qui correspond au niveau réel des réalisations effectuées sur lesdits titres fonciers », selon un avocat de la défense.

Une autre expertise contestée par la partie civile et le Procureur a évalué les mêmes réalisations à 11 milliards de Fcfa. Elle avait été faite par le président de l’ordre des experts immobiliers, ce qui est un gage de crédibilité. Mais tout se passait comme s’il y avait une volonté affichée des juges à condamner les accusés.

« Il est prématuré de prononcer une quelconque condamnation civile alors même que le niveau des investissements sur la parcelle n’a pas été déterminé de façon régulière », selon la défense qui a demandé de surseoir à la condamnation en matière civile, en attendant qu’une expertise régulière intervienne par rapport au montant correspondant aux investissements réalisés. Malgré ces mises en garde afin d’éviter une erreur judiciaire la Cour s’est exécutée sans hésitation ni murmure.

Boukary Daou

Envoyé spécial à Ségou

21 Juillet 2008