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La montagne a-t-elle accouché d’une souris, au sortir du 4ème congrès ordinaire de l’Adéma-PASJ, tenu les 24, 25, 26 et 27 Octobre 2008, au Centre International de Conférence de Bamako? A cette question, de nombreux adémistes répondent par l’affirmative. En effet, depuis la fin de ce congrès, les langues se délient pour expliquer que les attentes n’ont pas été suffisamment comblées. Puisqu’en lieu et place d’un véritable changement, on a assisté plutôt à un hold-up de missionnaires sur le Comité Exécutif. En quoi consiste-t-il, ce hold up? Qui sont ces missionnaires, et où ont-ils été envoyés en mission?


Les repêchés

Trois coordinations régionales ont bénéficié d’exceptions, ce qui leur permet d’avoir plus de représentants que les autres. Cela a conduit au repêchage de quelques anciens barons, pour qu’ils restent dans le CE. La première exception est accordée à Mopti. En effet, Ali Nouhoum Diallo n’était pas dans le quota de sa coordination régionale. Mais en le sortant du CE, on ne savait pas s’il fallait faire de lui un président d’honneur ou le mettre dans une des commissions spécialisées.

Après conciliabules et tractations, on a décidé de lui accorder une dernière chance au CE. Pour qu’il retourne -car il était déjà sorti-, c’est Yacouba Diallo qui a désisté pour que Ali devienne 10è vice-président. Connaissant les “capacités de nuisance” de Ali, a-t-on eu peur de le mettre de côté?

La deuxième région à bénéficier d’une exception est celle de Ségou. En raison de l’importance numérique de San qui a 4 députés dans la région, il a été décidé de repêcher Mohamed Traoré, actuellement secrétaire général de l’Assemblée nationale, bien que d’autres avaient plutôt pensé à Seydou Traoré élu à la tête de la nouvelle CENI, qui va organiser ces élections de 2009.

Pour ce qui concerne la région de Koulikoro, elle a bénéficié d’une exception. Ainsi, Lanséni Balla Kéita qui est membre du Parlement africain, était moins classé sur la liste de sa coordination régionale. En le repêchant, on a pris par extension les deux camarades qui le devançaient, dont Dialla Dagnoko qui conserve son poste de 1er adjoint à la communication du CE. Mais ce congrès a quand même fait des victimes et des déçus.

Les victimes et les déçus

Parmi les quelques barons qui sont sortis du CE, certains semblent avoir fait les frais d’une “chasse aux vieux” qui ne dit pas son nom. En effet, à la veille du congrès, des militants lançaient, chaque fois qu’ils rencontraient des responsables du CE qui ont leurs âges très avancés, cette boutade : “Au congrès, on va chasser tous les vieux du CE” . Les jeunes qui s’adressaient ainsi aux vieux étaient-ils porteurs d’un message par rapport à l’existence d’un quelconque complot contre les barons du 3ème âge?

En tout cas, la boutade s’est réalisée, car des vieux qui, pour la plupart des cas, ont dépassé 65 ans, sont sortis du CE. A commencer par Mohamédoun Dicko et le Pr Bocar Sall qui ont quitté pour grossir le rang des présidents d’honneur.

Quant à Moussa Alassane Touré, il va dans une commission spécialisée. Les autres vieux, à savoir Issiaka Bagayoko dit “Bachus”, Cyr Mathieu Samaké, Mandé Sidibé (qui a désisté de la 5ème vice-présidence qui lui était proposée), Moussa Soussain Dembélé, sont considérés comme de “jeunes retraités politiques”. Car le conseil des sages, dont la création est annoncée par le congrès, n’est qu’au stade de recommandation.

Par ailleurs, bien que sortis, d’autres sont capables de revenir au CE. C’est le cas de Cheick Pléah (chef de cabinet du ministre de l’Agriculture), de Seydou Traoré (président de la CENI), Modibo Diallo, Mandé Sidibé (Directeur du Mémorial Modibo Kéita), entre autres. La déception de ces derniers cache mal la joie des nouveaux venus

Les nouveaux venus

Le 4eme congrès ordinaire a fait des heureux, mais aussi des déçus. En plus de ceux qui se maintiennent en conservant ou changeant de postes, certains entrent au CE pour la première fois, tels que Ousmane Sy, Cheick Fantamady Traoré…. Mais le congrès a apparemment fait la part belle aux cadres qui ont démissionné de leurs partis politiques ou associations d’indépendants pour le PASJ ou qui ont fusionné avec cette formation politique.

Parmi eux, on cite Me Abdoulaye Garba Tapo, Me Kassoum Tapo, Mme Fatoumata Guindo, tous de l’ex-RND, Me Drissa Traoré (ex-PDA). D’autres se retrouvent dans les commissions spécialisées. C’est le cas de Issa Mariko (ex-PDCI), Idrissa Maïga (AMRE-ATT), Kola Kane Diallo (ex-PUDP)…

Reste donc, au parti, de prendre les dispositions pour que la salle de réunion puisse contenir tout ce beau monde. Sinon, des langues se délient déjà pour dénoncer le congrès qui n’aurait fait que du remplissage en créant “des postes inutiles”, avec la seule volonté de caser des partisans, parce qu’à “la tête du parti, on n’a pas le courage de se dire la vérité”.

Tout en gardant à l’esprit l’amère expérience de l’ancien CE, d’autres s’interrogent sur la nécessité, pour le parti, d’un bureau pléthorique. Certains se font élire au CE et après, deviennent des abonnés absents. A preuve, sur 53 membres, à peine si 30 participaient régulièrement aux réunions de la direction nationale sortante. Que dire donc du nouveau CE qui comprend 80 membres ?

La boulimie des missionnaires

Le moins que le puisse dire, c’est que le 4eme congrès a été l’occasion, pour ceux qui sont en mission du parti dans les institutions et autres structures de l’Etat, de s’illustrer. Il s’agit des cadres et responsables qui occupent des postes de responsabilité et de représentation au sein de l’administration d’Etat, au nom de l’ADEMA-PASJ.

En effet, après la formation du gouvernement, on a l’habitude d’entendre que tel et tel ministre est ADEMA, URD, RPM, CNID… C’est le cas également, par rapport aux membres des cabinets ministériels (secrétaire général, Conseiller technique, Chargé de Mission, Chef de Cabinet). Aussi, après la formation de chaque bureau à l’Assemblée, chacun est curieux de connaître le nombre de députés appartenant à un parti ou groupe de partis politiques. Cela est valable pour les autres institutions du pays, comme le Haut Conseil des Collectivités.

Mais contre toute attente, ce sont ces missionnaires qui ont décidé de venir jouer les premiers rôles à l’ADEMA-PASJ. En tout cas, lors du dernier congrès, ces personnes en mission ont décidé de contrôler le parti à travers le CE. Comme si le nouveau critère, pour accéder à un poste à l’ADEMA, est désormais l’exercice d’une fonction nominative ou élective.

Ainsi, en jetant un coup d’oeil sur la composition du bureau du nouveau CE, on constate que du président au 4è vice-président, les titulaires sont dans les institutions de la République. A preuve, Dioncounda Traoré, réélu pour un dernier mandat à la tête du CE, est président de l’Assemblée nationale du Mali. Quant à Iba N’Diaye, 1er vice-président du CE , il est, en plus de son portefeuille de ministre de l’Emploi et de la Formation Professionnelle, le vice-Premier ministre dans le gouvernement Modibo Sidibé.

Ensuite viennent, aux postes de 2e vice-président du CE, Sékou Diakité, ministre du Développement Social, et de 3ème vice-président du CE, Tiémoko Sangaré, ministre de l’Agriculture. Le 4ème vice-président du CE ADEMA s’appelle Oumarou Ag Ibrahim Haïdara, président du Haut Conseil des Collectivités du Mali.

D’autres missionnaires occupent de très bonnes positions dans le nouveau CE. C’est le cas de Mme Konté Fatoumata Doumbia, 6ème vice-présidente et maire de la Commune I du District, de Adama Sangaré, maire du District et 1er secrétaire à l’organisation du CE, de Assarid Ag Imbarcawane, 1er secrétaire administratif du CE et 2e vice-président de l’Assemblée nationale, de Timoré Toulenta, président du groupe parlementaire de l’ADEMA et secrétaire chargé des relations avec les élus…

On comprend alors qu’à part Seydou Traoré, président de la nouvelle CENI, tous ceux qui occupent des postes de responsabilité et de représentation au sein de l’administration d’Etat sont parvenus à se faire élire ou réélire membres du CE.

Alors, questions : Etre membre d’une institution devient-il le nouveau critère pour devenir membre du CE ADEMA ? Qu’adviendra-t-il si un possible remaniement ministériel venait à chasser du gouvernement les trois ministres qui suivent Dioncounda dans le nouveau CE ? Que cache ce marquage à la culotte entre les trois ministres ? Ce hold-up des missionnaires confirme-t-il ainsi les propos de ceux qui soutiennent qu’il faut désormais avoir les moyens -l’argent- pour avoir voix au chapitre à l’ADEMA?


Oumar SIDIBE

03 Novembre 2008