Le chef d’escadron Emile Bamkoui soupçonnait son épouse de le cocufier avec l’inspecteur Hervé Mapouro. Combien de cartouches ont-elles servi pour la besogne ? Sept, dix, quinze, ou peut-être un peu plus. En tout cas, sur le corps inerte d’Hervé Michel Mapourou Njifon, les impacts visibles témoignent de la violence de la rafale qui s’est abattue sur lui.
Malgré l’intervention rapide du Dr Bitang, médecin chirurgien à l’hôpital Laquintinie de Douala, l’inspecteur de police de 33 ans est mort. Manifestement après s’être vidé de son sang. Il s’agit-là de la conséquence des événements qui se sont déroulés dans la nuit du jeudi 13 au vendredi 14 novembre derniers, au camp des officiers de gendarmerie à Mboppi (Douala).
L’auteur présumé du crime s’appelle Joël Emile Bamkoui, chef d’escadron et commandant du groupement territorial de gendarmerie de Douala. Un meurtre de sang froid, qui a plongé toute la ville de Douala dans l’émoi depuis 72 heures.
Que s’est-il donc passé ?
Comme généralement en pareille circonstance, les thèses contradictoires s’entrechoquent. L’une d’elles, soutenue par la famille de la victime, rapporte ainsi que l’inspecteur de police Hervé Michel Mapouro Njifon était le collègue de service et un ami proche de la policière Danielle Bamkoui, l’épouse du commandant.
« Ils travaillaient ensembles au poste de police de l’aéroport de Douala. Ils s’entendaient beaucoup, et le commandant Bamkoui connaissait très bien Hervé. Il avait même l’habitude de l’inviter manger à son domicile… », indique un parent du défunt.
Lequel soutient par ailleurs que l’inspecteur de police Mapouro, qui préparerait activement son mariage, achetait régulièrement des liqueurs au Free Shop de l’aéroport international de Douala et les rangeait dans le véhicule de Danielle Bamkoui afin de les récupérer à la fin du service.
« La femme était rentrée avec ses liqueurs chez elle, et il était question qu’il aille les récupérer plus tard. Vers 19h, il ne pouvait pas y aller, parce qu’il y avait une coupure d’électricité dans le camp. Il y est allé vers 22h. Le commandant Bamkoui l’a trouvé chez lui alors qu’il déchargeait ses liqueurs du véhicule.
Il lui a intimé l’ordre d’entrer dans la maison, en lui indiquant qu’on lui a rapporté qu’il couchait avec sa femme. A l’intérieur de la maison, le commandant lui a demandé de se déshabiller sous la menace d’une arme. Une fois cela fait, il lui a tiré plusieurs balles dans l’abdomen et au pied. Entre-temps, la femme s’était enfuie… », explique la famille de l’inspecteur de police. Laquelle soutient qu’Hervé Mapouro s’est confié sur les circonstances du drame avant de rendre l’âme.
Contradictions
Malgré la présence d’une dizaine de pruneaux chauds dans son organisme, l’agent de police n’est en effet pas décédé sur le coup. Il a été transporté à l’hôpital Laquintinie de Douala vers 1h30 du matin, et c’est vers les coups de 7h du matin qu’il a finalement passé l’arme à gauche, affirme sa famille.
En attendant l’expertise d’un médecin légiste, cette version des faits est cependant battue en brèche dans les milieux de la gendarmerie. Une source proche du commandant Bamkoui confie, en effet, qu’il est de notoriété publique que l’inspecteur de police et sa collègue entretenaient des relations coupables.
« Renseignez-vous à l’aéroport de Douala, on vous dira que ces deux-là étaient amants. Mais le commandant Bamkoui aime tellement sa femme qu’il refuse même de voir les évidences, ni d’entendre ce qui se raconte partout. Mais cette fois, il a vu de ses propres yeux…« , raconte notre source.
Au sein du camp des officiers à Mboppi, certaines sources affirment ainsi que « Le commandant revenait chez lui à l’improviste, vers les coups de minuit. Sa femme croyait sans doute qu’il était en patrouille. Lorsqu’il est arrivé, il a longtemps klaxonné, mais personne n’ouvrait. C’est finalement la nièce de sa femme qui habite avec eux, qui est venue lui ouvrir la porte.
Une fois à l’intérieur, il n’a rien remarqué d’un coup, parce qu’il s’est dirigé vers la première chambre à coucher. Le couple a deux chambres, dont l’une climatisée et l’autre pas. Généralement sa femme préfère la seconde, parce qu’elle ne supporte pas l’air conditionné. Une fois sa tenue enlevée, le commandant est donc allé ouvrir la porte de la seconde chambre. Il y a trouvé sa femme couchée avec son amant… »
La même source proche de la gendarmerie soutient que les deux collègues avaient vidé une bouteille de whisky, et c’est la femme du commandant qui a « bondi » en premier sur son mari, lorsque celui-ci menaçait de faire constater les faits. Une bagarre s’en est suivie entre les trois acteurs, poursuit notre source.
« Le commandant Bamkoui a reçu un coup de bouteille sur la tête. C’est à ce moment-là qu’il a couru vers sa chambre pour récupérer son arme. Pendant ce temps, sa femme a porté les vêtements de son amant et a foncé avec lui vers son véhicule qu’elle a aussitôt tenté de démarrer en trombe. Mais le commandant a été assez rapide.
Il a tiré plusieurs coups et a atteint le jeune policier. Malgré tout, sa femme est parvenue à sortir du camp. C’est elle qui a d’ailleurs conduit son collègue à l’hôpital, et c’est elle qui a payé les premiers soins », confient les gendarmes.
Meurtrier
Sur le corps de l’inspecteur décédé, il n’y a cependant pas véritablement des traces attestant d’une quelconque violence. Et puis, l’emplacement des impacts de balles, sur les jambes et au niveau du pubis, laissent penser que le tireur a eu le temps de bien cibler ces zones pour faire souffrir sa victime avant qu’elle ne rende l’âme.
En tout cas, les enquêtes concomitamment conduites par la gendarmerie et la police judiciaire permettront peut-être de rassembler toutes les pièces du puzzle.
Aux dernières nouvelles, l’épouse du commandant Bamkoui s’est réfugiée chez son oncle, qui serait colonel à l’armée de l’air. Le meurtrier présumé, lui, aurait été « mis sous surveillance » après avoir été entendu à la Légion de gendarmerie en présence du commissaire du gouvernement près le Tribunal militaire de Douala.
Quant à la famille de l’inspecteur Mapouro, elle a rencontré le gouverneur du Littoral samedi dernier, pour le mettre au courant de son intention de porter plainte contre le commandant Emile Bamkoui.
« Il n’est pas à son premier coup. Il avait déjà eu un antécédent grave, qui a débouché sur une bagarre sanglante avec un officier de police du 8e arrondissement de Douala, qu’il soupçonnait toujours de sortir avec son épouse« , raconte une source
policière
Eugène Dipanda
Source quotidienmutations.infos
19 Novembre 2008