Partager

Sous l’égide de sa fondatrice, Mme Adame Ba Konaré, le Musée de la femme « Muso Kunda » a fêté la femme le samedi 6 mars dans le cadre des cérémonies commémoratives du 8 mars, Journée internationale de la femme. Des réflexions sur différents thèmes concernant la femme et un pamphlet dédié aux femmes ont meublé la rencontre.

Sous le thème générique de « journée de réflexion sur la problématique de la femme malienne de l’indépendance à nos jours », « Muso Kunda » a célébré à sa manière et de façon anticipée le 8 mars décrétée par l’ONU Journée internationale de la femme depuis 100 ans.

Des sous-thèmes comme « bilan de la lutte pour l’émancipation des femmes : forces et faiblesses », « la voix des jeunes filles » et « femmes et valeurs culturelles » ont été débattus. « Muso Kunda », selon sa présidente fondatrice, veut marquer de son sceau les 50 ans du Mali et de la plupart des pays africains en choisissant comme date la Journée internationale de la femme pour faire une introspection de la marche des femmes maliennes.

Mme Bintou Sanankoua, historienne et ex-député, a ouvert le bal avec le bilan de la lutte de la femme de 1960 à 2010 en dégageant les forces et faiblesses. Selon elle, le 8 mars est le symbole de la lutte des femmes depuis le 19e siècle pour l’amélioration de leurs conditions de travail et l’acquisition du droit de vote.

La Journée internationale de la femme, à ses dires, est née à Copenhague au cours d’une rencontre internationale en 1910. La date du 8 mars a été initiée plus tard en Allemagne pour commémorer la journée de façon unitaire à l’échelle planétaire. Au Mali, en 2009, les femmes représentent 50,14 %, a estimé Mme Sanankoua avant d’affirmer que « depuis 50 ans, la situation de la femme malienne ne cesse de s’améliorer ».

La lutte des femmes sous la Ire République a été marquée par les femmes qui voulaient s’émanciper et celles dites engagées dans la lutte d’indépendance. Les premières sont lettrées et connaissent leurs droits et ont été de ce fait brimées par des mutations abusives. Les secondes sont des analphabètes et absentes à des postes de décision.

L’historienne a pris pour repère la réforme de 1962 dans l’enseignement comme point de départ de la libération de la femme malienne. Celle-ci n’avait pas le droit d’étudier au-delà du BEPC. L’adoption du code du mariage et de la tutelle a aussi libéré la femme de toutes les pratiques dégradantes comme les répudiations dans un mariage.

La période du coup d’État de 1968 à la transition de 1991, marque un autre tournant décisif dans la marche des femmes. Selon Mme Bintou Sanankoua, l’arrivée des militaires en 1968 a vu la suspension des activités des organisations féminines. Celles-ci ne trouveront leur salut que dans la création d’une commission technique qui a abouti à la mise en place de l’UNFM en 1974.

Cette instance a le mérite d’avoir allégé la corvée des femmes avec l’installation des moulins, les centres de formation professionnelle, la création des PMI. Mais tout n’est pas rose à ce niveau. « Sur le plan politique, l’UNFM a écrit une page sombre de l’histoire des femmes. Celles-ci étaient instrumentalisées et l’UNFM s’est opposée au multipartisme », a indiqué Mme Sanankoua.

Les IIe et IIIe Républiques constituent pour Mme Sanankoua une période où la femme malienne a joué un grand rôle avec une entrée massive au gouvernement. Pendant ces périodes, notre pays a connu la première femme gouverneur du district, ambassadeur, ministre du Développement rural, etc. Les femmes ont aussi été à la première loge dans le règlement de la crise au nord et la crise scolaire. Un commissariat à la promotion de la femme a été créé.

Le bilan fait état de 20 % de femmes dans le gouvernement, 9 % à l’Assemblée nationale, 11 % dans les ambassades et 14 % aux postes de conseillers techniques des ministères. Sur le plan économique, les femmes dans le secteur agricole représentent 75 % et 72 % dans le secteur alimentaire.

La conférencière a déploré l’absence de masse critique de femmes dans les postes de décision. Au ministère de l’Education, sur 40 proviseurs, 2 sont femmes et il n’y a que 4 directrices de Cap sur 66. Au ministère de la Fonction publique, 66 % de postes de responsabilité reviennent aux femmes et 27 % au ministère de la Justice.

Manassa Danioko et Afoussatou Thiéro toutes deux magistrats ont parlé du statut juridique de la femme au Mali déterminé par le social et la religion. Le genre et l’équité sont deux concepts pris en compte par la Constitution de février 1992, qui s’engage à défendre les droits de la femme et de l’enfant. Le code du mariage et de la tutelle, le code pénal protègent davantage la femme dans son intégrité physique.

L’islam accorde une large place à la femme dans tous les domaines de la vie, a rappelé Adame Maïga, présidente du Fidama, une association islamique.
Le centre international de la presse qui avait fait salle comble a enregistré la présence des femmes qui ont marqué la lutte féminine du Mali de la période coloniale et sous la première République.

Les doyennes Mme Sissoko Sira Diop, Mme Dembélé Bassata Djiré, Mme Tall Fatou Soucko, Adame Maïga ont effectué le déplacement au CICB pour témoigner leur engagement malgré leur état de santé et le poids des ans. La vieille garde a côtoyé les cadettes Manassa Danioko, Afoussatou Thiéro, Guindo Fatoumata Kéita, Cissé Oumou Ahmar Traoré, Sidibé Kati Sangaré, entre autres.

La modératrice de la cérémonie, Rokiatou Ba Touré a assuré la police des débats. Beaucoup d’intervenants ont salué la tenue de la journée riche en enseignements.

D’autres ont salué l’initiative d’Adame Ba Konaré dont le discours sur la femme a charmé le public. Sa proposition sur la journée du 6 mars comme journée de communion dans les foyers a été favorablement accueillie.

Abdrahamane Dicko

08 Mars 2010.