Malgré les progrès, les obstacles à une plus grande représentativité des femmes dans les instances de prise de décision restent nombreux.Le Mali célèbre chaque année la Journée internationale de la Femme depuis 1994. Mais plus qu’une simple célébration, la Journée du 8 mars est un hommage reconnu de la communauté internationale à la détermination et à la persévérance des femmes pour l’amélioration de leur statut, de leurs conditions socio-économiques et pour leur rôle dans la préservation de la paix. Cette journée a été dédiée à la femme suite à la révolte des ouvrières des usines de textiles de Chicago en 1857.
Ce mouvement marquait en effet une étape importante dans le combat pour l’émancipation des femmes. Pour soutenir cette lutte, des instruments internationaux contenant des directives susceptibles de faire progresser l’égalité entre les sexes et les droits des femmes ont été élaborés. Au nombre des initiatives, il y a la célébration de la décennie des Nations unies pour la femme à Mexico (1975), à Copenhague (1980) et à Nairobi (1985).
En 1990, le Caire, la capitale de l’Egypte accueillait la conférence internationale pour la population et le développement. Puis viendra la conférence de Beijing en 1995 où sera adopté du programme d’action. La Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes (CEDEF) est un autre acquis. Cette année, le thème international retenu est « Mêmes droits, mêmes opportunités : Progrès pour tous ».
Mais en raison de la célébration du Cinquantenaire de l’Indépendance, notre pays a été bien inspiré de choisir à nouveau un thème national : « Situation de la femme malienne de l’Indépendance à nos jours ». Les organisateurs de la Journée expliquent que ce choix vise à valoriser l’image de la Malienne dans le développement social économique et culturel du pays.
Communication, mobilisation sociale, plaidoyer.
En même temps, c’est une occasion d’informer les femmes sur les opportunités existantes pour leur participation au processus de construction nationale. Et de développer des stratégies, actions et activités de soutien à la promotion de la femme, et faire le plaidoyer pour la prise en compte de l’équité du genre dans les politiques et programmes gouvernementaux. Mais les objectifs visés ne seront atteints qu’à travers la communication, la mobilisation sociale et le plaidoyer. L’on ne se lassera de le rappeler : au Mali, les femmes représentent la majorité de la population totale.
73,4 % d’entre elles vivent en zone rurale, 82,3 % n’ont jamais fréquenté un établissement scolaire, 14 % n’ont pas dépassé le niveau de l’école primaire. Seulement 0,1 % de nos sœurs ont un niveau universitaire ou post-universitaire. La population féminine est jeune : 44, 9 % ont moins de 15 ans. Elle est active particulièrement dans l’agriculture (83,7 %), le commerce (8 %) et l’artisanat (4,1 %).
Plus de 80 % des femmes travaillant dans l’agriculture et le commerce vivent en milieu rural. Celles qui travaillent dans l’administration générale et publique sont employées à 90 % en milieu urbain. Les salariées représentent 0,7 % de la population féminine active.
Ces statistiques parlent d’eux-mêmes. Elles doivent donc inciter à prendre en compte la faible représentation des femmes dans la vie publique. Surtout qu’il n’est un secret pour personne qu’elles ont joué un grand rôle dans l’accession de notre pays à l’Indépendance.
Au plan politique, elles se sont battues toujours aux côtés des hommes pour assurer le bien-être de la société. Du temps de la colonisation, elles ont mené ce combat à travers les partis politiques et les associations et organisations de femmes.
En fait, de 1960 à 1990, les femmes avaient été toujours affiliées aux partis politiques uniques en tant qu’organisations de masse. L’éclosion des associations et organisations de femmes ne se produira qu’à partir de 1991 à la faveur de l’avènement de la démocratie pluraliste.
Cette nouvelle page a donné un souffle nouveau au combat des femmes et leur a permis de militer dans les partis politiques et les organisations de la société civile et particulièrement dans les organisations de défense des femmes. L’émancipation des femmes s’est traduite par leur nomination à des postes de responsabilités à différents niveaux de prise de décision. Leur représentativité au sein de l’Assemblée nationale et des autres Institutions de la République s’est accrue.
Sur le plan économique, des études réalisées pour le suivi de la mise en œuvre du Cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (CSLP) et du Cadre stratégique pour la croissance et la réduction de la pauvreté (CSCRP) ont démontré que le niveau de pauvreté a baissé de 68,3 % en 2001 à 59,2 % en 2005 et à 47,5 % en 2006. L’analyse dénote cependant un décalage significatif entre le milieu rural (73,04 %) et le milieu urbain (20,12 %).
Un amendement rejété.
Et les mêmes études ont montré que la couche les plus touchée par la pauvreté reste celle des femmes. Pour une plus grande implication des femmes rurales dans l’économie agricole, la Fédération nationale des femmes rurales (FENAFER) a été créée en 2003 grâce à une volonté politique. Deux ans plus tard (en 2005), le Réseau des femmes opératrices économiques verra le jour. Des mesures législatives et réglementaires, dont la Loi d’orientation agricole adoptée en 2006 sont venues renforcer ces organisations.
Sur le plan de l’éducation, l’égalité des chances entre filles et garçons, consacrée dans la Constitution en son article 18 a été visible grâce aux efforts de l’État et des partenaires au développement. Cependant l’alphabétisation des femmes reste encore très problématique : seulement 17 % d’entre elles sont alphabétisées selon l’Enquête démographique et social (EDS IV).
Au plan sanitaire, beaucoup d’actions ont été menées par le gouvernement et les partenaires au développement pour améliorer la santé des populations en général et en particulier celle des femmes et des enfants, comme la gratuité de la césarienne.
Au chapitre institutionnel, de l’Indépendance à nos jours, il a toujours existé un mécanisme gouvernemental de prise en charge de la promotion sociale, économique et juridique de la femme dans notre pays. Sur le plan juridique, notre pays dans sa quête de promouvoir les droits fondamentaux des femmes, a ratifié des conventions internationales notamment la Convention sur l’élimination de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes et les deux conventions sur les droits civils et politiques, économiques, sociaux et culturels.
D’autres conventions ont été signées par le Mali comme le protocole de Maputo. Cependant pour l’égalité du genre dans le processus de prise de décision, il reste beaucoup à faire. Selon une enquête du ministère de la Promotion de la Femme, de l’Enfant et de la Famille, réalisée en 2006, le taux de représentation des femmes à ce niveau est seulement de 10 %.
C’est cette situation qui avait motivé les femmes à l’Assemblée nationales, avec à leur tête Mme Ascofari Oulématou Tamboura, à relancer la lutte pour une plus grande représentativité des femmes dans les instances de décision, en tentant d’introduire dans la loi électorale un amendement qui stipulait qu’aucune liste de parti politique aux élections ne devait comporter plus de 70 % d’hommes.
L’amendement fut rejeté par la majorité des députés au grand désespoir des femmes. Ceux qui étaient contre prétendirent que cette initiative défendait uniquement les intérêts d’une catégorie de la population. Le chemin est encore long vers l’égalité dans le genre.
Mariam A. Traoré
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Les Maisons de la femme et de l’enfant de Bamako inaugurées hier : Beaux cadeaux de 8 Mars
Ces structures qui sont au nombre de dix à tavers tout le pays, serviront d’espaces socio-éducatif pour les enfants et de promotion pour les femmes
Le président de la République, Amadou Toumani Touré, a officiellement remis hier, les clés des deux Maisons de la femme et de l’enfant du District de Bamako. L’événement a été marqué par la grande mobilisation des femmes et de enfants de toutes les catégories socioprofessionnelles de la capitale.
La cérémonie s’est déroulée en présence du Premier ministre Modibo Sidibé, des membres du gouvernement, des présidents des Institutions de la République, des représentants du corps diplomatique et des organisations internationales, des responsables de nombreuses associations et Ong féminines. L ’épouse du chef de l’État, Mme Touré Lobbo Traoré, qui préside la Fondation pour l’Enfance était présente.
C’est le 12 janvier 2008 que le président de la République procédait à Bamako à la pose de la première pierre du chantier de 10 Maisons de la femme et de l’enfant qui devaient être construites dans le pays. 24 mois plus tard, les 10 Maisons étaient entièrement achevées. De Kidal, à Kayes, en passant par Koulikoro, Sikasso, Ségou, Tombouctou, Mopti, Kidal et maintenant Bamako (sur les deux rives du fleuve Niger), les femmes disposent désormais de leurs « Maisons ».
Les réalisations sont le fruit de la fructueuse coopération que notre pays entretient avec la République Populaire de Chine. Les 10 structures ont coûté 59 500 000 de Yuans RMB, soit près de 7 milliards Fcfa. Elles ont été entièrement financées par la République populaire de Chine dans le cadre des accords de coopération économique et technique signés entre les deux pays le 15 juillet 2004 et le 29 juillet 2005.
À Bamako, les deux joyaux sont bâtis à Sabalibougou en Commune V pour la rive droite, sur une superficie de 1ha 44a 52ca et à Darsalam en Commune III pour la rive gauche, sur une surface de 55a 67ca. La configuration des deux Maisons est presque identique : un bloc administratif (bâtiment à deux niveaux avec 9 bureaux), un bloc pédagogique (bâtiment à deux niveaux, 2 bureaux, 8 salles polyvalentes de formation et 2 salles informatiques multimédia), 2 salles informatiques multimédia.
À cela s’ajoutent un jardin d’enfants, une unité de soins, une salle et de consultation avec un lien fonctionnel, une cantine et diverses autres commodités. L’ambassadeur de la République populaire de Chine, Zhang Guoquing, a rappelé à l’occasion la qualité des relations de coopération entre les deux pays.
Ces relations datent formellement du 25 octobre 1960, soit un mois seulement après l’accession de notre pays à l’indépendance. Le diplomate chinois a rappelé que les 10 Maisons de la femme et de l’enfant construites dans notre pays représentent des cadeaux que la Chine nous offre dans le cadre de la célébration du Cinquantenaire de l’Indépendance.
Pour le ministre de la Promotion de la Femme, de l’Enfant de la Famille, Mme Maïga Sina Damba, ces infrastructures constituent un cadre idéal de concertation, d’échanges, de formation, de partage d’idées et d’expériences entre les femmes pour relever les défis comme l’analphabétisme, les problèmes liés à la santé, l’accès à l’information et le faible accès aux opportunités.
Mme Maïga Sina Damba a par ailleurs rendu un hommage appuyé au président de la République pour son engagement au côté des Maliennes dans le combat pour leur promotion et le développement. La porte-parole des femmes, Mme Touré Nana Aïcha Cissé, a salué les initiatives du président de la République de doter les femmes du Mali de ces structures qui leur serviront de cadre de travail et de promotion de leurs droits.
Dans un entretien accordé à la presse après la cérémonie d’inauguration, le président de la République, Amadou Toumani Touré a remercié le partenaire chinois pour son aide multiforme. « Votre engagement est discret mais efficace. La construction de ces Maisons me tenait particulièrement à cœur. Surtout pour la cause mes très chers amis, les enfants. Elles constitueront pour ceux-ci un espace socio-éducatif et d’éveil psycho-intellectuel », a déclaré le président Touré qui a rendu un hommage mérité aux Maliennes pour leur engagement constant dans le combats pour le développement du pays.
Le chef de l’État a insisté sur le choix des femmes cadres qui seront appelées à diriger ces institutions. Celles-ci devront faire preuve de probité morale et intellectuelle. « Ces femmes doivent être compétentes, engagées, et ne doivent afficher aucune coloration politique. Cela est nécessaire pour que toutes les femmes du Mali, sans distinction d’appartenance politique ou religieuse, puissent s’approprier ces Maisons », a dit en substance le président Touré.
Doussou Djiré
L’Essor du 08 Mars 2010