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Le modèle démocratique libéral prend de l’eau, il a fait le lit d’une médiocratie internationale qui s’est emparée partout du pouvoir d’Etat, déclare l’ancien ministre de l’Education malienne Issa N’Diaye.

« Partout les libertés des peuples sont menacées. La volonté des pays du nord se manifeste de plus en plus dans des décisions unilatérales voire d’expéditions militaires pour soumettre les peuples aux seuls intérêts des multinationales« , a déclaré le président du Forum Civique malien au cours de la conférence plénière.

Indiquant que l’action des sociétés civiles africaines est de plus en plus confrontée à « l’arrogance des pouvoirs en place », Issa N’Diaye enfonce le clou, affirmant que les décideurs politiques locaux du continent se moquent des opinions de leurs propres populations. « Ils sont seulement attentifs aux instructions de leurs parrains occidentaux« , dit-il.

Le conférencier a déclaré qu’il ne suffit plus d’agir sur le terrain des luttes sociales. « La société civile ne doit plus continuer à s’interdire l’action politique. Les problèmes auxquelles elle est confrontée sont de nature politique. Leur résolution passe nécessairement par un levier politique« .

Pour le professeur de philosophie, il y a nécessité pour la société civile africaine de prendre le contrôle des pouvoirs de décisions politiques, si l’on veut résoudre les problèmes auxquels ils sont confrontés. « Il ne faut plus en faire l’exclusivité des partis politiques« , a-t-il poursuivi.

Pour lui, le modèle partisan à l’échelle planétaire donne des signes d’essoufflement. « Il faut que les partis politiques cessent d’être des coalitions plus ou moins sordides de promotion individuelle. Il faut changer la politique elle-même pour en faire un instrument de résolution des questions que se posent les citoyens« .

« Ce n’est pas pour rien que les taux de participation aux élections dépassent rarement le tiers des votants. Le désintérêt des peuples pour le système démocratique est évident. Mais leur entrée sur la scène politique est une nécessité historique« , de conclure M. N’Diaye, souhaitant un monde nouveau, plus juste et plus humain.

Très actif au Forum, Dr Oumar Mariko appelle la société civile malienne à refuser catégoriquement la privatisation de nos sociétés et entreprises. La CMDT, dans la ligne de mire des multinationales occidentales, doit échapper à la privatisation.

L’ancien leader estudiantin a invité les participants à la rencontre de Fana à prendre l’exemple sur la résistance de la société civile nigérienne. Ne voyant pas d’un bon œil la privatisation annoncée de la SOTELMA, Youssouf Diop de Global Communication, Network-Mali, souhaite l’instauration d’un moratoire sur les privatisations et de faire un bilan des premières déjà effectuées dans notre pays.

« Le crash du secteur des télécommunications dans certains pays qui se sont séparés de leur multinationale est une opportunité de remettre en cause les politiques de désengagement total de l’Etat dans le secteur. La privatisation va entraîner une mainmise des multinationales sur le réseau national« , a soutenu Youssouf Diop de Global Communication.

Sory Ibrahim GUINDO

Envoyé spécial

De nombreux sujets, comme les OGM, débattus

Nombreuses sont les questions, relatives notamment aux OGM (Organismes Génétiquement Modifiés) et à l’intégration africaine, à être débattues par le Forum des Peuples de FANA.

La sempiternelle question des OGM est au cœur de la rencontre de FANA où de nombreux points de vues sont exprimés. Ancien Directeur de recherche à l’INRA (Institut National de Recherche Agronomique, France) au Département de Génétique et d’Amélioration des Plantes, Michel Gillet affirme que les critiques habituellement faites aux OGM ne sont pas toujours pertinentes.

A la question de savoir si les OGM pourraient être dangereux pour la santé, directement, par leur consommation, car « on a violé les barrières de la Nature », le scientifique affirme que ce risque ne peut valoir que pour les organismes consommés par l’homme, directement ou par animaux interposés, comme le maïs.

Ce n’est pas le cas du coton, dit-il. « Le seul risque possible viendrait de la nouveauté. Mais il n’y a aucune raison de penser que ce risque soit pire que celui des produits de traitement, ni même que celui de toutes les variétés créées depuis un siècle par sélection classique, ou celui des cosmétiques« , a souligné l’orateur, pour qui la vraie solution consisterait à être aussi exigeant pour toutes les variétés quelles qu’elles soient, aussi bien pour les produits de traitement, les cosmétiques, que pour les médicaments.

Peut-on et doit-on interdire les OGM ?
« J’ai dit qu’un OGM était beaucoup plus rapide à obtenir qu’une variété classique. C’est là un atout décisif, car dans le monde actuel on est incapable de savoir ce dont on aura besoin dans 10 ans. L’OGM, lui, répond à un besoin actuel.
C’est pourquoi, je crois qu’essayer de les faire interdire tous est voué à l’échec. Seuls, ceux qui produiraient un médicament risqueraient d’avoir assez d’impact pour être interdits dans des espèces consommées par l’homme
« , soutient-il.

Le succès des OGM, poursuit Michel Gillet, ne peut que donner encore plus de pouvoir aux multinationales. « Je n’y vois personnellement pas d’inconvénient, pourvu qu’elles ne puissent pas utilisées cela de façon nocive« .

Nombreux sont les intervenants à dénoncer la privatisation annoncée de la CMDT qui donnera, selon eux, le champ libre aux multinationales, aidée notamment par l’USAID, de nous imposer les OGM.

«L’introduction des OGM dans notre agriculture aura pour conséquence la destruction du patrimoine génétique malien», soutient un participant.

Pour le renforcement de l’UA

Pour doter l’Union Africaine (UA) de « fondations solides », il faut la renforcer et lui donner une base financière solide pour soutenir au mieux le processus d’intégration, a affirmé jeudi, à FANA (120 km de Bamako), l’altermondialiste togolais Edu Koku Raven qui prend part, à l’instar d’un millier de personnes des mouvements sociaux d’Afrique et d’Europe au 4ème Forum des Peuples qui se tient en contrepoint au sommet du G8.

M. Edu Koku Raven, journaliste/communicateur, vice-président de l’Association des Praticiens de l’Education au Développement au Togo (Aped-Togo), a indiqué « qu’avancer sur la voie de l’intégration exige un engagement politique indéfectible et des efforts intenses, et il faudrait que l’UA résolve définitivement certaines questions institutionnelles ».

A l’instar de l’Union Africaine, l’orateur a appelé au renforcement des capacités de toutes les communautés régionales (UEMOA, CEDEAO, SADC, CEMAC…) du continent.

Il espère sur l’adoption d’un système de règles pour la mise en œuvre du programme d’intégration, de manière à faire appliquer les normes et les engagements en matière d’intégration à tous les niveaux.

« Il faut rationaliser les communautés régionales dont un grand nombre favorise la dispersion des ressources, freine le processus d’intégration du continent et met à mal les capacités et les ressources des gouvernements, obligés de faire face à différents agendas et exigences« , a-t-il ajouté.

Pour le journaliste/communicateur, « Il nous faut un élargissement de l’espace économique et commercial pour la production et les investissements. Il nous faut aussi élaborer des procédures transitoires pour remplacer progressivement les dispositions institutionnelles existantes« , a-t-il recommandé.

Du rôle des communautés, le vice-président de l’Association des Praticiens de l’Education au Développement au Togo indique qu’elles doivent aussi concevoir des systèmes concrets de mobilisation des ressources, d’autant que l’insuffisance de financements à toujours été le maillon faible du processus d’intégration sous-régionale.

Pour stimuler le commerce intra-régional, M. Edu Koku Raven pense qu’il faut intégrer les marchés, réorienter le commerce en le libéralisant davantage, en harmonisant les politiques et en encourageant l’investissement étranger.

Sory Ibrahima GUINDO

Envoyé spécial à Fana

11 juillet 2005