Partager

L’anniversaire de l’accession d’un pays à la souveraineté nationale et internationale est une formidable occasion de réjouissance et de communion entre les enfants d’un pays. Au Mali, le 22 septembre était, sous la première République, synonyme d’une véritable explosion de joie en reconnaissance de la liberté retrouvée.

Retraite au flambeau, manifestations folkloriques et sportives sur toute l’étendue du territoire national, une fête qui durait toute la nuit, la veille de l’anniversaire. L’apothéose était atteinte, le jour même du 22 septembre, avec le grand défilé qui impliquait tous les corps en uniforme et les forces vives de la nation composées des jeunes, des femmes et des syndicats.

L’avènement du régime dictatorial CMLN-UDPM de Moussa Traoré, à la suite d’un coup d’Etat scélérat perpétré par un quarteron de jeunes officiers sans envergure, mit fin au régime de Modibo Kéita, le père de l’indépendance. Celui-là même qui édifia les fondations (solides) de la jeune République via la mise en place d’un tissu industriel qui résiste encore à l’épreuve du temps et le modelage de la conscience de l’homme malien.

Le pays entrera alors dans une longue nuit de 23 ans et les valeurs qui fondèrent, jadis, la première République, fondirent comme beurre au soleil. Cette longue léthargie s’accompagna d’un vide institutionnel au plan politique. L’incurie atteindra le sommet et la vie socio-économique sera marquée par la gabegie, le népotisme, l’affairisme et beaucoup d’autres ismes.

Le pays, qui se trouva en coupe réglée, réalisa un fantastique bond en arrière. Pris dans le tourment des sécheresses cycliques, de «  la course effrénée à l’enrichissement illicite  » (l’expression est de Moussa Traoré lui-même) et des règlements de comptes sanglants, le nouveau régime a vite fait de ranger la commémoration de l’accession à l’indépendance dans les oubliettes. Le 22 septembre était alors régulièrement «  fêté dans le recueillement  » l’expression fétiche des autorités d’alors.

Avec l’avènement de la démocratie pluraliste à la faveur des événements de mars 1991, l’on assista à une tentative (timide) avec des formules comme la décentralisation de la fête dans les régions et les défilés militaires géants. Des formules souvent couronnées de réussite comme à Bamako (défilé militaire géant) à Kidal et récemment à Sikasso. Force est, cependant, de constater que la dimension fête populaire et la communion nationale se fait toujours désirer.

Il est vrai que le gouvernement vient de décider de célébrer, avec faste, le cinquantenaire du Mali qui aura lieu en 2010. Mais, au-delà de ce coup d’éclat, il urge que les Maliens reviennent à leurs anciennes amours et commémorer, dans la ferveur patriotique, l’anniversaire du jour qui les a vus se libérer du joug du colonialisme.

Ce faisant, ils devront, au-delà de l’aspect festif de l’événement, saisir l’occasion pour opérer un réarmement moral, comme au bon vieux temps des années 1960. C’est en cela et en cela seulement qu’ils pourront se détourner des raccourcis faciles de la compromission et retrouver les valeurs d’antan, faites d’amour du travail bien fait, du respect quasi-sacré de la chose publique, de civisme, du sens de l’honneur, d’esprit de sacrifice et de solidarité. C’est comme cela seulement que nous pourrons valoriser nos fabuleuses ressources naturelles (agro-pastorales et minières) façonner nos ressources humaines pour faire du Mali un pays émergent, respecté dans le concert des nations. Malgré la gravité de la situation, le sursaut est toujours possible. Bon anniversaire, chers concitoyens !


Yaya SIDIBE

23 Septembre 2008