Si l’année 2008 est réputée avoir été celle des rudes épreuves pour le peuple malien, malgré les résultats satisfaisants enregistrés par le pays dans presque tous les domaines, 2009 sera vraisemblablement celle au cours de laquelle les Maliens devraient serrer la ceinture pour affronter les difficultés. En effet, il n’est pas évident que l’argent qui leur a manqué l’année dernière soit si vite de retour, à cause de la crise financière mondiale qui ne cesse de s’accentuer.
C’est justement ce manque d’argent qui risquera de jouer un sale tour à tous. D’abord aux hommes politiques qui préparent des élections municipales lesquelles ouvriront sans nul le bal des candidats pour 2012. Ensuite aux compatriotes qui achètent de plus en plus cher. Enfin au gouvernement qui a besoin de ressources pour maintenir la pression sur le pouvoir d’achat, lutter contre l’insécurité, notamment au Nord-Mali et poursuivre la mise en oeuvre du PDES du Président ATT.
ATT sous la pression
Généralement, Janvier est le mois protocolaire pour le Président de la République avec les cérémonies de présentation de voeux. Ces cérémonies lui permettent d’être devant les caméras pour convaincre de sa volonté de bien faire. Le Président ATT n’a pas manqué de sacrifier à cette tradition.
En effet, dans son adresse à la Nation pour le Nouvel An, Amadou Toumani Touré a indiqué que 2008 a été l’année des rudes épreuves pour le peuple malien, malgré la bonne pluviométrie et les résultats satisfaisants enregistrés par le pays dans divers domaines.
Par la même occasion, le Chef de l’Etat a déclaré que l’année 2009 sera celle des défis à partager, étant donné que les chantiers ouverts ou à ouvrir sont nombreux.
Malgré ces assurances, les Maliens commencent à avoir un sentiment de doute généralisé quant à leur avenir. Même si le pouvoir fait beaucoup pour juguler la crise, les difficultés se font plus menaçantes. A commencer par la crise au Nord. “Ceux qui prennent les armes nous trouveront sur leur chemin (…). Nous ne tolérerons plus des actes de narcotrafiquants”, a lancé ATT.
Cette réaction du Chef de l’Etat traduit la nervosité de ses compatriotes face à la crise qui s’enlise, étant donné que les bandits viennent de frapper jusqu’à Nampala, en 4è région du pays. C’est la preuve qu’ils se croient en terrain conquis où tout leur est permis. Le Président de la République est donc obligé de changer de fusil d’épaule, estiment certains de ses compatriotes, pour régler cette crise.
Le gouvernement a besoin de sang nouveau
L’autre raison de la nervosité du peuple reste et demeure le manque d’argent. En effet, au lieu de consommer moins cher, les ménages maliens achètent plus cher. Pourtant, le gouvernement a accordé des exonérations à des opérateurs économiques pour qu’ils importent certains produits.
Les Maliens ne comprennent pas que les prix ne baissent pas à hauteur de leur souhait sur les marchés. C’est dire qu’avec ces exo, les prix n’ont pas baissé, alors que ces taxes sont des recettes perdues pour le Trésor Public. Peut-on alors parler de mafia entre opérateurs économiques et certains serviteurs de l’Etat, au détriment du peuple?
On comprend donc que le pouvoir d’achat reste toujours la priorité des Maliens, même s’ils apprécient les efforts des autorités en faveur de la réalisation des logements sociaux, des infrastructures routières…
Cependant, l’une des solutions du gouvernement aux difficultés des ménages est sans nul doute l’initiative riz pour combattre l’insécurité alimentaire dans notre pays. Déjà, l’on se félicite des résultats de cette première année d’exercice. Mais il va falloir que les consommateurs pensent à constituer des stocks de sécurité pour faire face à l’après abondance, car on ne sait jamais.
Au pouvoir également de prendre des dispositions afin d’aider les producteurs à mieux gérer leurs récoltes, au grand bonheur des consommateurs qui ont envie de manger le riz neuf produit au Mali et non le riz âgé de dix ans, importé par des opérateurs économiques dont le seul souci demeure le profit.
Afin de donner un peu de tonus à l’action gouvernementale, il n’est pas surprenant que le Chef de l’Etat pense à des retouches en faisant appel à de nouvelles compétences. Cela est nécessaire si l’on sait que certains ministres ont montré leurs limites à la tête de leurs départements respectifs, sans compter que d’autres sont atteints par l’usure du pouvoir et n’ont plus rien à démontrer à leurs postes.
Personne n’est sans savoir que chaque fois qu’il y a un changement à ce niveau, le peuple reprend de l’espoir et se dit que le Président veut prendre les affaires en mains.
Dans la plupart des cas, ces ministres qui doivent partir cultivent le culte de la personnalité. Pour eux, la seule stratégie pour rester au gouvernement, c’est de continuer à chanter le nom du Président et du Premier ministre, à chaque occasion. Des fois, on va jusqu’à improviser des discours pour se faire signaler au Chef, pendant que les problèmes s’accumulent au niveau de leurs départements respectifs.
Les municipales arrivent
Les Maliens seront appelés aux urnes pour élire les nouveaux conseillers communaux cette année. Ces élections arrivent dans un contexte particulier marqué par l’extrême pauvreté. Aussi, dans certains cas, les populations jugent leurs maires incompétents.
C’est le cas pour les maires dans les grandes villes, notamment à Bamako, qui en l’absence des délégations spéciales, vont assurément préparer leur réélection. Pour d’autres, au contraire, c’est l’ensemble du conseil municipal qui n’est pas à la hauteur.
C’est dire jusqu’à quel point ces élections s’annoncent plus compliquées pour les différents acteurs qui se fixent des objectifs. Idem pour les populations qui risquent de vouloir prendre leur part avant le vote. C’est pourquoi, au sein de certaines formations politiques, l’on risque de taire les querelles intestines pour faire face à ce scrutin.
En effet, pour ce scrutin, certains partis politiques tenteront de présenter des listes de candidatures dans des circonscriptions choisies. Car à part l’ADEMA-PASJ, et dans une moindre mesure, l’URD, aucun n’est en mesure de le faire dans toutes les Communes. Quant au RPM, il tentera de faire un bon score qui lui permettra de se choisir une voie à suivre en 2012.
En allant à ce scrutin, les uns se fixeront l’objectif de détrôner l’ADEMA de sa place de première force politique du pays ou de battre l’URD ; tandis que d’autres se contenteront de glaner quelques conseillers dans la perspective de bénéficier d’une grande part de l’aide de l’Etat aux partis politiques. C’est dire que les majorités issues des dernières municipales sont en danger.
Comme on le voit, la décision du mouvement démocratique d’organiser, le 3 Janvier dernier, une conférence unitaire en souvenir de la marche du 31 Décembre 1990 est loin de tuer les enjeux des municipales de 2009. Même si en participant à cette conférence à l’initiative de l’ADEMA, chaque acteur du mouvement démocratique vise un objectif.
Le MC menace
Si les partis politiques sont en train de préparer leurs dernières cartouches pour ces municipales, du côté du Mouvement Citoyen, on n’a pas encore dit son dernier mot par rapport à ce rendez-vous électoral. En effet, après les conférences dans toutes les régions pour expliquer le PDES d’ATT, Ahmed Diane Séméga et ses camarades entendent aller d’abord à une convention.
Le but recherché serait de faire un grand rassemblement qui sonnera le retour des dissidents. Ensuite, il serait question de procéder à l’élargissement de la base du mouvement qui est en train de recevoir des adhésions tous azimuts, dit-on.
Tout porte à croire que le MC tiendra cette convention avant les municipales dans l’espoir de présenter des listes de candidatures propres afin d’avoir ses propres conseillers communaux. Il serait impensable que le mouvement ne contrôle pas des conseils communaux et ait des militants dans des bureaux communaux du pays.
En tout état de cause, bon nombre d’acteurs risqueront de revoir leur ambitions à la baisse, car sans argent, il est difficile d’atteindre les objectifs politiques. Cela est d’autant plus vrai que la crise de confiance aidant, ajoutée au fait que les ressources de certaines communes urbaines se réduisent aux taxes perçues, le foncier se faisant rare, il va sans dire que les électeurs ne se mobiliseront plus les jours de vote.
Beaucoup d’entre eux, à défaut d’une promesse de terrain à usage d’habitation, exigeront qu’on paie à l’avance leur bulletin pour qu’ils aillent voter.
C’est dire que tout acteur qui n’a pas les ressources financières nécessaires n’aurait rien, excepté sa bouche, pour crier à la fraude. Une fois le sort de ce scrutin scellé, l’on risque d’assister à des positionnements pour 2012. Puisqu’après les municipales, il n’ y aura plus d’élection avant cette date.
Oumar SIDIBE
06 Janvier 2009