Il y a 21 ans naissait, contre vents et marées, le journal « Les Echos ». Réconforté par le succès de la revue culturelle Jamana, créée 5 ans plus tôt, Alpha Oumar Konaré décidait d’aller plus loin : en créant un journal d’informations générales. L’enjeu était de taille, car il y avait péril en la matière à cause du régime dictatorial.
Soutenu par son épouse et quelques amis, celui qui sera plus tard le premier président, élu démocratiquement de la IIIe République, parvient à créer le premier véritable journal indépendant sous le régime tyrannique du général Moussa Traoré, car, pour lui, seule la presse pouvait désormais servir de catalyseur à une prise de conscience réelle.
Référence et repères du Mouvement démocratique, « Les Échos » a joué un rôle déterminant dans le combat pour l’avènement de la démocratie dans notre pays. Bimensuel, hebdomadaire puis quotidien, il a été de tous les nobles combats du Mali ces dernières années.
Créé dans les conditions difficiles, se maintenir dans les kiosques, n’était pas pourtant un combat gagné d’avance. En effet, ils n’étaient pas nombreux ceux qui pouvaient croire à une telle longévité du fleuron des publications Jamana dans un contexte politique où le moindre écart de liberté était considéré comme un crime de lèse-majesté.
Mais les initiateurs ont pris le risque de le lancer dans le strict respect de la loi.
Conçu depuis janvier 1989, il a fallu attendre le 17 mars de la même année pour sa parution afin de rendre hommage à Abdoul Karim Camara, assassiné sous la dictature de Moussa Traoré. Ainsi le vendredi 17 mars, au petit matin, les Bamakois ont eu l’agréable surprise de voir partout des jeunes revendeurs leur tendre le premier numéro des Echos.
Tiré initialement à 2000 exemplaires en mars 1989, le journal « Les Échos » est devenu hebdomadaire, tiré à 30 000 exemplaires (un taux jamais égalé encore) en mars 1991 avant de devenir en février 1994 quotidien tout en gardant sa parution hebdomadaire.
Après les élections de 1992 qui ont vu la victoire d’Alpha Oumar Konaré à la présidentielle, les ennemis de la démocratie s’en sont pris au siège de Jamana le 5 avril 1993 dans le seul but d’anéantir « Les Échos » et à d’autres institutions de la République comme l’Assemblée nationale et aux sièges des partis politiques… La surprise fut grande de voir le journal paraître le lendemain.
Une dédicace à Cabral
Le journal « Les Echos » fait partie du patrimoine national. Après sa contribution à l’avènement de la démocratie et sa participation à son ancrage, le journal est devenu une véritable entreprise : une rédaction dynamique avec des journalistes professionnels, un service commercial performant, une équipe de PAO compétente.
Lieu d’apprentissage, l’encadrement des jeunes et la rigueur dans le travail priment sur les intérêts personnels. L’implication effective de tous et les conseils ne manquent pas. Ce qui fait que le journal reste dans le cadre déontologique du métier.
» Les Échos », c’est la mise en valeur du journaliste à travers des enquêtes ciblés et des témoignages, ce qui permet de forger la personnalité à travers des analyses éclairées.
» Les Échos » reste le journal le mieux distribué au Mali, l’un des journaux les plus crédibles de la place. « Les Échos » a contribué à immortaliser Cabral en lui dédiant son 1er numéro le 17 mars 1989. Cabral restera un héros aux vertus morales et sociales inestimables.
En effet, le 17 mars 1980, le peuple malien stupéfait apprenait la mort d’Abdoul Karim Camara dit Cabral, leader estudiantin. Cet assassinat allait sonner le glas du régime antidémocratique de l’UDPM. Onze ans après les actes barbares actes commis par Moussa et ses complices, son régime va lamentablement chuter sous les coups de boutoir de l’Association des élèves et étudiants du Mali (AEEM) et du Mouvement démocratique malien le 26 mars 1991.
En raison de l’engagement de l’illustre disparu de son vivant, chaque 17 mars depuis l’avènement de la démocratie, le Mali tout entier salue son combat à travers des manifestations comme le dépôt de gerbe de fleurs au monument à son effigie à Lafiabougou en Commune IV.
Anne-Marie Kéita
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Témoignages : Des journalistes témoignent
Abdou Karim Arby (cofondateur « Le Scorpion ») :
» Si je ne lis pas le journal Les Échos le matin, je me sens pas bien. C’est mon journal de référence. L’histoire des idées et de la démocratie au Mali est liée à ce journal. Le pouls du Mali, c’est Les Échos. Quelqu’un a dit que si un journal avait le droit de siéger au Comité de transition pour le salut du peuple (CTSP), Les Échos pouvait revendiquer cette place au même titre que l’AMDH, l’AEEM, l’UNTM… Ce qui est tout à fait juste vu tout ce qu’il a fait pour l’avènement de la démocratie au Mali.
Les Échos a concouru à libérer les esprits, la pensée et la parole. Il a joué un rôle très important dans la libération de la pensée et de la liberté d’expression au Mali. Je n’ai vraiment pas grand-chose à reprocher au journal.
Il progresse beaucoup, de bimensuel à sa création, il est devenu hebdomadaire par la suite, et quotidien depuis quelques années maintenant. La seule critique que j’ai à faire, c’est qu’avec son réseau de correspondants, il ne puisse dire beaucoup plus sur ce qui se passe dans le Mali profond ».
Bruno Segbedji (journaliste « L’Indépendant ») :
» Les Échos est un journal que j’apprécie beaucoup, notamment pour les articles qui s’y trouvent. Il ne s’intéresse pas trop aux détails. J’apprécie ces papiers très courts qui donnent l’essentiel. Or ce n’est pas facile de faire la synthèse et de dire beaucoup de choses en peu de mots. Les Échos est un journal qui a le mérite de réussir cela. C’est un journal bien monté. Bref un journal fait par les professionnels. Pour les améliorations, je soughaite que le nombre de page soit augmenté avec des pages centrales en couleur. Avec ces changements, je pense que ça serait encore mieux ».
Boukari Daou (rédacteur en chef « Le Républicain ») :
» Je commencerai d’abord par souhaiter un joyeux anniversaire au journal et lui souhaiter longue vie pour qu’il puisse continuer à informer, sensibiliser et éduquer les Maliens. Les Échos a permis au peuple malien de savoir qu’il est possible de critiquer et que cette possibilité est même un droit pour l’individu, pour les associations et pour les communautés. Je retiens de ce journal et de cet autre journal appelé « La Roue » qu’il a permis l’éveil de la classe intellectuelle pour organiser la population à la lutte historique qui a abouti au changement du 26 mars 1991.
Chaque fois que je vois Les Échos, c’est ce regard d’admirateur que je lui porte. Il doit continuer à porter le flambeau et je suis très heureux de constater que le flambeau est très bien porté par l’équipe actuelle. Je n’ai pas de critique à porter sur le journal. Je trouve le nombre de page acceptable compte tenu de l’environnement médiatique, du lectorat et du marché malien »